Les Solutions Fondées sur la Nature (SFN) : une démarche alternative aux solutions techniques pour répondre aux besoins humains

19 mai 2025

Résumé

Dans la continuité des démarches déjà anciennes s’appuyant sur le génie écologique, les Solutions Fondées sur la Nature ( SFN) ont pour objet une gestion et utilisation durable de la nature afin de relever les défis environnementaux : changement climatique, risques écologiques, pollutions de l’eau, agriculture biologique, etc. Leur développement a été promu à partir des années 2010 par les institutions internationales notamment par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, et, plus récemment, par l’Union Européenne. Elles permettent à la fois de régénérer les écosystèmes et d’apporter des solutions locales efficaces à des problèmes tels que l’épuration de l’eau, l’élévation du niveau de la mer, la fréquence accrue des risques naturels, l’altération du cycle de l‘eau, l’utilisation de pesticides, les pollutions diverses. Des dispositifs existent au niveau mondial et en France pour accompagner la montée en compétence des acteurs locaux qui mettent en œuvre ces SFN. Leur multiplication permettrait de répandre une pédagogie de recherche d’alternatives au techno-solutionnisme, tout en rendant les humains plus sensibles à l’impératif de préservation de la biodiversité.

Auteur·e

Lapierre Catherine

Ingénieur de l’école centrale des arts et manufactures, économiste, est membre du secrétariat d’édition de l’encyclopédie du développement durable.


Les SFN découlent de la reconnaissance des services rendus par la nature. Cette reconnaissance ouvre la possibilité d’alternatives aux solutions purement techniques le plus souvent mises en œuvre avec des impacts très nocifs sur les écosystèmes. IL s’agit d’associer les savoirs du génie écologique à l’élaboration des méthodes d’exploitation du vivant (agriculture, élevage, pêche, foresterie), aux schémas d’aménagement du territoire et aux réponses apportées aux risques du écologiques actuels, tout en contribuant à limiter l’effondrement de la biodiversité.

Cet article rappelle l’antécédent des pratiques issues de l’ingénierie écologique dans certains secteurs. Il souligne le grave déséquilibre affectant l’usage humain non durable de la nature. Il reprend la définition des SFN donnée par les organismes internationaux, présente diverses réalisations en France et retrace les efforts pédagogiques dans le monde et en France pour permettre leur multiplication.

  1 - le précédent de l'ingénierie écologique

De longue date, en France et ailleurs, le génie écologique a mis en évidence les capacités de la nature à répondre aux besoins humains et suscité des applications concrètes. Ainsi la re- naturalisation des cours d’eau, l’aménagement de zones d’expansion de crues, la protection des zones humides, l’élimination par filtration naturelle des pollutions, …, font partie de la gamme des instruments d’action habituels des instances en charge de la gestion de l’eau. De même, en agriculture, les méthodes de l’agroécologie alternatives à l’agriculture intensive, attentives à la préservation de la fertilité des sols et à la biodiversité, sont expérimentées et recommandées depuis plusieurs décennies.

Ces pratiques anciennes appartiennent, avant la lettre, à l’univers des SFN, ce concept promu à partir des années 2000 par les instances internationales en charge de la biodiversité. L’UICN souligne que les SFN englobent d’autres types de démarches déjà expérimentées en écologie (adaptation basée sur les écosystèmes, restauration écologique, approche écosystémique) tout en en fournissant un cadre général de mise en œuvre.

  2 - la recherche de démarches alternatives aux technologies favorables à la biodiversité

Le bien être humain sur terre dépend de la biodiversité. Pour mieux le mettre en évidence les organisations internationales en charge de la question ont mis en avant les services gratuits rendus aux hommes par les écosystèmes.

Une liste des services rendus à l’humanité par les écosystèmes naturels a ainsi été établie par l’IPBES (Plateforme Intergouvernementale scientifique et politique sur la Biodiversité et les Services Ecosystémiques).

IPBES : Les services apportés par la nature aux populations et les indicateurs proposés

  • 1 Régulation de process environnementaux :
    • 1-1 Création et entretien d’habitats (indicateur : Étendue des habitats appropriés Intégrité de la biodiversité)
    • 1-2 Pollinisation et dispersion des graines et autres propagules (Diversité des pollinisateurs Étendue de l’habitat naturel dans les zones agricoles)
    • 1-3 Régulation de la qualité de l’air (Émissions de polluants atmosphériques retenues et prévenues par les écosystèmes)
    • 1-4 Régulation du climat (Émissions de gaz à effet de serre prévenues et absorbées par les écosystèmes)
    • 1-5 Régulation de l’acidification des océans (Aptitude des milieux marins et terrestres à piéger le carbone)
    • 1-6 Régulation de la distribution quantitative, spatiale et temporelle des eaux douces (impact des écosystèmes sur la répartition de l’eau entre l’atmosphère, la surface terrestre et le sous-sol)
    • 1-7 Réglementation de la qualité des eaux douces et des eaux côtières (Étendue des écosystèmes qui filtrent l’eau ou y ajoutent des éléments)
    • 1-8 Formation, protection et décontamination des sols et des sédiments (Teneur en carbone organique du sol)
    • 1-9 Régulation des aléas et des évènements extrêmes (Aptitude des écosystèmes à annuler ou amortir les effets des aléas)
    • 1-10 Régulation des organismes et processus biologiques nuisibles (Étendue de l’habitat naturel dans les zones agricoles Diversité des hôtes compétents de maladies à transmission vectorielle)
  • 2 Matériaux et assistance :
    • 2-1 Énergie (Étendue des terres agricoles Étendue des terres boisées)
    • 2-2 Alimentation humaine et animale (Étendue des terres agricoles Abondance des stocks de poissons marins)
    • 2-3 Ressources médicinales, biochimiques et génétiques (Pourcentage d’espèces connues et utilisées à des fins médicinales au niveau local Diversité phylogénétique)
  • 3 Apports immatériels :
    • 3-1 Apprentissage et inspiration (Nombre de personnes vivant en proximité avec la nature Diversité des formes de vie dont on peut tirer des enseignements)
    • 3-2 Expériences physiques et psychologiques. Soutien identitaire (Zones de paysages terrestres et marins naturels et traditionnels)
    • 3-3 Soutien identitaire (Stabilité de l’utilisation et de l’occupation des terres)
  • 4 Maintien des options (Probabilité de survie des espèces, Diversité phylogénétique)

Au vu de cette liste, le constat implacable est que seuls les services de la catégorie 2 correspondant au prélèvement de matériaux et de ressources sont utilisés, au détriment des 14 autres qui permettent la régulation des processus environnementaux ou la préservation d’une variété d’options pour l’avenir. L’IPBES dans son rapport de l’évaluation mondiale de la biodiversité et les services écosystémiques 2019 indique : « Aujourd’hui plus d’aliments, d’énergie et de matières que jamais auparavant sont fournis à la société en de multiples endroits, mais cela se fait de plus en plus aux dépens de la capacité de la nature de fournir de telles contributions, et fréquemment au détriment de nombreuses autres contributions, qui vont de la régulation de la qualité de l’eau à un sentiment d’appartenance. Depuis 1970, la production a augmenté dans les secteurs de l’agriculture, de la pêche, des bioénergies et des industries extractives tandis que 14 catégories de contributions parmi les 18 analysées ont décliné. »

Les Solutions Fondées sur la Nature exploitent toutes les potentialités liées à ces services rendus à titre gratuit par la nature. Mais cette exploitation ne doit pas entrer en contradiction avec l’objectif majeur qui reste la nécessité de protéger la nature et de lutter contre le risque qui demeure d’effondrement de la biodiversité. En effet ce risque met en danger la capacité des écosystèmes naturels à assurer les services gratuits qu’ils rendent à l’humanité.

 3 - les Solutions Fondées sur la Nature (SFN) : répondre aux besoins humains grâce à la nature

Même si les solutions fondées sur la nature ont bien évidemment existé depuis longtemps, ce n’est que dans la période récente que les Institutions, notamment celles en charge de la biodiversité ont proposé des définitions et des typologies très précises, en montrant comment elles se démarquent des approches classiques de conservation de la nature.
« Les points de vue sur la conservation de la nature ont évolué ces dernières décennies et un changement de paradigme s’est produit. Partant d’approches plus conventionnelles centrées sur la nature sauvage et les habitats naturels, puis sur les menaces pesant sur les espèces, elles ont évolué vers des approches mettant l’accent sur les relations entre les humains et la nature. Les Solutions Fondées sur la Nature (SFN) ont été développées suite à ce changement de paradigme où les humains sont passés d’un mode d’action où ils bénéficiaient passivement de la nature à un mode d’action proactif de protection de la nature, de gestion ou de restauration des écosystèmes, afin de répondre aux grands défis de société du XXIe siècle, … » [1] .

Les Solutions fondées sur la Nature sont définies par l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) comme :
« es actions visant à protéger, gérer de manière durable et restaurer des écosystèmes naturels ou modifiés pour relever directement les défis de société de manière efficace et adaptative, tout en assurant le bien-être humain et en produisant des bénéfices pour la biodiversité ».
Les Solutions fondées sur la Nature se déclinent en trois types d’actions, qui peuvent être combinées dans les territoires et avec des solutions d’ingénierie civile :

  • La préservation d’écosystèmes fonctionnels et en bon état écologique ;
  • L’utilisation d’écosystèmes pour une gestion durable des activités humaines ;
  • La restauration d’écosystèmes dégradés ou la création d’éco¬systèmes.

Cette définition des Solutions Fondées sur la Nature a été largement reprise par la cinquième session de l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement (UNEA-5.2) qui a eu lieu en mars 2022. Elles ont été définies comme « des actions visant à protéger, conserver, restaurer, utiliser durablement et gérer les écosystèmes terrestres, d’eau douce, côtiers et marins, naturels ou modifiés, qui répondent aux défis sociaux, économiques et environnementaux de manière efficace et adaptative, tout en assurant simultanément le bien-être humain, les services écosystémiques, la résilience et des bénéfices en matière de biodiversité  ».

Les SFN correspondent ainsi à des modalités d’action au niveau local reliant besoins humains et soin de la nature. Elles illustrent à ce titre la démarche intégrée du développement durable. Si elles participent d’une vision utilitaire partielle de la nature, leur intérêt est de démontrer qu’il est possible de répondre aux besoins humains grâce à la nature.

 4 - Les multiples domaines d'application des SFN

Les SFN permettent de répondre à de multiples objectifs : atténuer (notamment grâce aux puits de carbone) et s’adapter au réchauffement climatique, préserver le cycle de l’eau, résorber les pollutions, se substituer aux pesticides, etc. Elles sont applicables dans de très nombreux secteurs. En voici quelques exemples en France métropolitaine [2] .

4-1 Agriculture : agroécologie, agroforesterie, haies, accroissement de la biodiversité
  • Les différentes méthodes de culture et d’élevage relevant de l’agroécologie sont des Solutions Fondées sur la Nature. Tout en procurant une alimentation saine elles préservent les puits de carbone, la fertilité des sols, la recharge des nappes phréatiques et la biodiversité.
  • L’agroforesterie qui consiste à implanter des arbres dans les terres agricoles ou les prairies est un premier pas vers une restauration d’une agriculture respectueuse de la nature, de même que la reconstitution des haies de séparation des parcelles. C’est l’objet de programmes dans la Stratégie Nationale française de Biodiversité (SNB) [3] . L’ADEME et l’OFB ont attribué à la Communauté de Communes de Saint Gal-Suisse Normande engagée en ce sens depuis plusieurs années le rôle de démonstrateur de la reconstitution du bocage du programme « Life Artisan » d’appui aux SFN en France. On constate une hausse de 6 à 20% des rendements dans une parcelle entourée de haies.
  • L’élevage extensif sur prairies humides est une Solution Fondée sur la Nature d’adaptation au changement climatique. Il permet d’entretenir et de valoriser des zones humides réservoirs de biodiversité et dont le puits de carbone précieux dans l’atténuation du changement climatique est avéré. Une expérimentation de Mesure Agro-Environnementale (MAE) collective (financement par le deuxième pilier de la PAC [4] ) a été mise en place sur trois sites pilotes : la baie de Somme, les marais du Cotentin et du Bessin et le marais du Brouage. Les agriculteurs de ces sites se sont constitués en collectif, partageant des bonnes pratiques favorables à la biodiversité.
4-2 Forêts : gestion durable, prévention des incendies et de l’érosion en montagne, accroissement de la biodiversité

Les SFN contribuent à une meilleure résistance des forêts au réchauffement climatique, les protégeant des incendies, préservant leur fonction de puits de carbone et améliorant leur biodiversité.

  • Un programme de sensibilisation des exploitants forestiers aux pratiques de gestion adaptées a été mise en place dans le haut Jura pour sauver la filière bois.
  • Dans le parc naturel des Alpilles, l’objectif est de réintroduire le pastoralisme qui rend le territoire moins vulnérable aux incendies. Une SFN visant la prévention des incendies de forêt consiste notamment en un quadrillage des espaces boisés permettant, en concertation avec les propriétaires et acteurs forestiers, d’augmenter les secteurs favorables à la biodiversité, d’effectuer un débroussaillage conservant une hétérogénéité de la hauteur des végétaux et de dégager le couvert dans les secteurs trop denses qui pourront accueillir par la suite des pâturages en milieu ouvert.
  • Après l’incendie dans la forêt de la Croix Valmer sur la Côte d’Azur une régénération naturelle et l’acclimatation d’autres variétés (chêne vert) sur certaines parcelles sont expérimentées.
  • Pour prévenir les incendies dans le parc régional des Pyrénées catalanes une expérience de brûlage dirigé et de pâturage est menée.

Des SFN permettent de renforcer le rôle des forêts contre les risques en montagne tout en favorisant la biodiversité.

  • Dans les forêts de protection du Mont blanc des peuplements forestiers diversifiés sont expérimentés. La pose d’obstacles naturels au sol (troncs de bois morts) protège contre les risques de chutes de blocs avec un coût 4 fois moindre que le génie civil pour une efficacité équivalente.
  • Dans le parc national des Cévennes sont implantées des espèces diversifiées pour remplacer les châtaigniers dépérissant.
4-3 Gestion de l’eau : préservation-restauration des zones humides, recharge des nappes phréatiques, épuration, prévention des inondations, accroissement de la biodiversité

Les SFN font depuis longtemps partie des outils des acteurs investis dans le domaine de la gestion des eaux, notamment celui des Agences de l’eau. A titre d’exemple ces acteurs ont mené des campagnes sur la protection et la valorisation des zones humides.
Les exemples plus récents ci-dessous illustrent la multifonctionnalité des SFN. La création-restauration de zones humides, la renaturation du lit d’un cours d’eau permettent simultanément, entre autres, de limiter le réchauffement climatique en accroissant un puits de carbone, de se prémunir contre les inondations, contre l’érosion et d’accroître la biodiversité inhérente à ces zones naturelles.

  • À la suite d’un diagnostic sur l’attribution des éboulements et inondations récurrents liés aux interventions de rectifications, d’endiguement des années 1750 à 1995 une SFN de restauration du fonctionnement ancien de la plaine alluviale de Faverges a été décidée par la Communauté de Communes en reconnectant le marais et le lit de la rivière Saint Rulph-Glière-eau et en mettant en place une sylviculture stabilisatrice.
  • Dans le même département de Haute Savoie, répondant aux mêmes objectifs, la restauration du lit historique de la rivière Giffre a été décidée par les communes concernées. Cette restauration confèrera de plus un atout touristique au site.
  • La restauration du lit de la rivière Pénerf et sa reconnexion avec les prairies humides voisines a été entreprise par le Parc Naturel du golfe du Morbihan avec les mêmes objectifs et principes.
  • Un exemple similaire concerne le projet Isère amont qui a pour objectif de protéger les terres agricoles et les zones urbanisées des crues d’une rivière endiguée depuis le XIXe siècle. 16 champs d’inondation seront aménagés pour ralentir la crue. Une forêt alluviale sera recréée.
  • On pourrait également citer le programme de restauration écologique du Rhône dans la lisière sud de Lyon.
  • Le Conservatoire d’espaces naturels de Picardie a entrepris depuis une vingtaine d’années, en liaison avec les agriculteurs concernés, de maintenir la vocation agro-environnementale des prairies de fauche inondables en moyenne vallée de l’Oise, vastes champs d’expansion des crues de l’Oise et de la Seine, contre les pressions des mutations des systèmes agricoles, de l’exploitation des ressources alluvionnaires et de l’expansion de l’urbanisation. Le programme Life Artisan et la présence d’un site Natura 2000 ont permis la reconnaissance de la valeur de ces prairies.
  • Le recours au génie végétal permet d’éviter l’érosion du lit de la Durance et les inondations.

La nature peut également contribuer à la dépollution de l’eau.

  • Inspirées par les zones humides naturelles, les zones de rejet végétalisées (ZRV) mobilisent les services écosystémiques (régulation qualitative et quantitative) rendus par celles-ci. Issues des recherches en génie écologique, les ZRV améliorées garantissent la protection du milieu récepteur en réduisant la pollution résiduelle et en lissant les pics de débits sortants. Elles se composent de différents compartiments, tels que les bassins, les roselières ou les méandres qui se succèdent et permettent chacun un traitement spécifique.
4-4 Gestion souple du trait de côte : limitation de l’érosion, prévention de la submersion, accroissement de la biodiversité

20% du littoral français subit une érosion côtière, 242 municipalités sont confrontées au recul du trait de côte. 30km2 de terres ont été perdus depuis 50 ans. La réponse apportée précédemment avec les enrochements s’avère insuffisante. Des solutions fondées sur la nature sont expérimentées pour limiter le risque. En voici quelques exemples :

  • Dans la baie de l’Aiguillon, on utilise les vasières comme zones tampon entre mer et terre en nettoyant les concessions ostréicoles abandonnées. Elles protègent le trait de côte en absorbant l’eau et réduisant la force des vagues.
  • Les étangs et marais des salins de Camargue (6 500 ha) sont constitués de terres gagnées tardivement sur la mer et qui ont fait l’objet de 50 années d’exploitation salicole avec une circulation de l’eau entièrement artificialisée. Le site est particulièrement exposé à la dynamique côtière et à la remontée du niveau de la mer. Le projet de SFN consiste en un retrait maîtrisé et progressif du trait de côte sur les secteurs en érosion et la reconnexion hydro-biologique des lagunes entre elles ainsi qu’avec la mer et les sous-bassins versants périphériques. La décision a été prise de ne pas entretenir ni reconstruire la digue de front de mer dont le maintien était devenu intenable, ce qui entraîne le début de reformation d’un lido naturel à l’arrière des brèches de la digue. Un plan de gestion annuel des plages (aires de stationnements aux entrées de plages, plan de circulation réglementée, information des usagers...) permet de protéger ces cordons dunaires.
  • La gestion des forêts littorales et des milieux dunaires associés constitue une solution adaptée pour préserver la biodiversité (habitats, espèces) et maintenir des écosystèmes résilients, gage d’une adaptation au changement climatique. Gérant près de 380 km de dunes sur le littoral atlantique, l’Office national des forêts met en place depuis plus de trente ans une méthode de gestion dans le respect des processus naturels, le contrôle souple. Basée sur le génie écologique, cette gestion permet le contrôle de l’érosion marine (le sable des dunes réalimente les plages après les épisodes de tempêtes), la protection de l’arrière-pays des invasions de sable (contrôle de l’érosion éolienne) la protection et la conservation d’écosystèmes, d’espèces et de paysages rares et originaux et la contribution à une activité touristique raisonnée et durable.
  • Les enrochements installés par les communes sur le littoral vendéen pour permettre l’accès aux plages étaient soumis à des phénomènes d’érosion constants, phénomènes eux-mêmes aggravés par la présence de ces enrochements. Ces érosions sont susceptibles d’être aggravées à l’avenir avec l’élévation du niveau de l’océan. En lien avec la Communauté de Communes du Pays de St-Gilles-Croix de Vie, il a été décidé d’enlever les enrochements afin de rétablir une dynamique naturelle d’évolution du cordon dunaire. En le protégeant par des branchages pour limiter l’érosion éolienne et la plantation d’oyats fixant le sable.

Le projet de recherche « Life Adapto » permet un échange des bonnes pratiques entre tous les acteurs confrontés à la gestion de ce littoral atlantique.

4-5 Végétalisation des villes : lutte contre les ilots de chaleur, prévention des inondations, épuration de l’eau, accroissement de la biodiversité
  • Une gestion des eaux pluviales plus naturelle

Pour la gestion des eaux pluviales, alors que les techniques « classiques » ont longtemps cherché à maîtriser totalement le cycle de l’eau par des infrastructures grises comme les canalisations, les cuves enterrées, les réservoirs et le génie civil qui va avec, de nombreux rapports d’étude visent à promouvoir la mise en place de techniques alternatives au « tout-tuyau », largement fondées sur la pleine terre et la végétation. Elles favorisent l’infiltration et l’épuration des eaux à la parcelle et la multifonctionnalité des ouvrages de gestion des eaux pluviales. Les sols comme les plantes jouent un rôle d’éponge en facilitant l’infiltration naturelle de l’eau de pluie vers les nappes ou la cime au sein du végétal. Les aménagements végétalisés peuvent prendre plusieurs formes en ville, comme des noues, des jardins de pluie, des mares, ou des espaces verts qui font office de zone de récupération d’eau. Sur la voirie ou les espaces contraints, on peut utiliser des revêtements comme des dalles enherbées ou des pavés drainants végétalisés.

Selon l’OFB 23% des eaux pluviales peuvent être retenues dans le sol grâce à la présence d’arbres et à la dés-imperméabilisation. Concrètement, une étude de cas à Nanterre montre que le coût annuel pour gérer 1 m3 d’eau pluviale par le réseau alternatif mis en place dans le parc de Chenevreux est compris entre 6,33 et 11,06 euros/m3 tandis que celui d’une infrastructure grise de la rue Anatole-France, à Levallois-Perret, est évalué à au moins 37,07 euros/m3 sur la base d’une même quantité d’eau à gérer [5].

  • La végétalisation des villes contribue à l’atténuation des ilots de chaleur tout en favorisant la biodiversité.
    Selon l’OFB (Office Français de la Biodiversité) l’évapotranspiration d’1 arbre sur 1 journée rafraîchit autant que 5 climatiseurs pendant 20h. Plusieurs villes françaises sont engagées dans un renforcement de la végétalisation.

A travers ses différents plans la ville d’Orléans maximise la présence du végétal en ville. De nombreux parcs publics et jardins privés, plus de 25 000 arbres, des sites naturels et agricoles, favorables à la biodiversité maillent le territoire. Lors des opérations d’aménagement urbain, l’espace public est végétalisé (plantation d’arbres) et les habitants peuvent également participer via la végétalisation des façades ou la création de jardins partagés.

A Lille entre 2018 et 2022, neuf cours d’école ont été désimperméabilisées et végétalisées. À terme, l’ensemble des écoles lilloises seront perméables. 1815 fosses de plantation en pleine terre ont été installées au pied des bâtiments en 20 ans. Elles ont permis le développement de plantes grimpantes sur les façades rafraîchissant l’air ambiant et améliorant la qualité de vie des citadins.

Le programme Life ARTISAN de l’ADEME et de l’OFB a désigné Lille et Lyon-métropole comme démonstrateurs d’une adaptation des villes aux changement climatique
Le prochain plan d’urbanisme de la ville de Paris comporte les mêmes objectifs.

Pour la végétalisation une préférence pour les végétaux indigènes est souhaitable afin de sauvegarder la diversité génétique locale. Les végétaux sauvages issus de collecte en milieu naturel, dans un territoire bio- géographique considéré, sont porteurs d’une diversité génétique spécifique, issue de plusieurs siècles d’évolution en lien avec le milieu environnant. La diversité génotypique améliore la réponse au stress hydrique.

 5 - la multifonctionnalité des SFN, leur utilité particulière pour l'adaptation au réchauffement climatique

Tous les exemples de SFN ci-dessus illustrent leur multifonctionnalité. Elles permettent de prévenir des risques naturels, contribuent à l’atténuation du changement climatique et au rétablissement de la biodiversité. Ce sont des solutions dites « sans regret », remplissant leurs fonctions quelle que soit l’évolution du climat, du moins en dessous d’un certain seuil de réchauffement, avant que n’apparaissent des irréversibilités.

La pertinence particulière des SFN pour l’adaptation au réchauffement climatique doit être soulignée. La Stratégie Nationale Biodiversité 2030 mais surtout le projet de troisième Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC3) en consultation leur fait une place explicite. La mesure 13 de la PNACC3 s’intitule : « renaturer les villes », la mesure 20 : « déployer les Solutions Fondées sur la Nature ».

Les vulnérabilités sont conséquentes. En France 18,5Mhb sont exposés aux risques d’inondations avec 2560 communes concernées. 1,5Mhb sont exposés au risque de submersion marine, 20% des 5000km de littoral subissent déjà une érosion du trait de côte. 6870 communes sont exposées aux feux de forêt. Selon la PNACC3 30% des forêts françaises sont déjà soumises à ce risque, en 2050 ce sera 50%. Avec une fréquence accrue des canicules les habitants des villes seront exposés plus longtemps aux ilots de chaleur, les problèmes de recharge des nappes phréatiques vont s’accroitre.

Les exemples de SFN ci-dessus démontrent leur contribution à l’adaptation au réchauffement climatique qui s’accompagnera d’une multiplication et d’une intensification des évènements climatiques extrêmes. Il en est ainsi pour la renaturation des cours d’eau et des forêts, la gestion souple du littoral ou la végétalisation des villes. Les SFN supposent toutefois une disponibilité et une maîtrise du foncier.

L’ADEME souligne que les SFN ne peuvent à elles seules tenir lieu de programmes d’adaptation. Elles doivent s’insérer dans « des trajectoires d’adaptation » évolutives qui combinent des objectifs de court terme et de moyen terme, pour donner le temps à l’acquisition des connaissances. Elles ne font pas obstacle à la recherche d’autres solutions et peuvent se combiner avec, par exemple, des constructions d’ouvrages défensifs.

 6 - Les conditions normatives et financières du développement des SFN au niveau mondial

Les SFN sont un type d’action visant à la fois une réponse aux besoins humains et à ceux de la nature alors que, dans les faits, la réponse aux besoins humains a souvent été jusqu’ici au détriment de la nature. Il s’agit d’un changement culturel qui appelle un grand effort pédagogique auprès d’une multitude de maîtres d’ouvrage opérant sur des sites délimités. Pour ces raisons l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) a jugé nécessaire d’élaborer un standard mondial des SFN avec son guide d’utilisation.

6-1 Le standard international des SFN proposé par l’UICN

Après une vaste consultation le standard et son guide ont été publiés en 2020. Le standard comporte 8 critères.
Critère 1 : les SFN répondent efficacement à des défis sociétaux (identification claire du (des) défi(s), partagé(s) avec toutes les parties prenantes, évaluation régulière de la réponse apportée).
Critère 2 : la conception d’une SFN est une question d’échelle (prise en compte des interactions entre économie, société et écosystèmes, recherche de synergies, prise en compte des incidences au-delà du site d’intervention).
Critère 3 : les SFN procurent des avantages nets à la biodiversité et à l’intégrité de l’écosystème (diagnostic initial et évaluation régulière de la santé de l’écosystème).
Critère 4 : les SFN sont économiquement viables (identification et mesure des gains et des coûts directs et indirects).
Critère 5 : les SFN reposent sur des processus de gouvernance inclusifs, transparents et habilitants (parties prenantes identifiées et associées dans la transparence au processus, dans le respect de leurs droits et intérêts).
Critère 6 : Les SFN trouvent un juste équilibre entre la réalisation de leur(s) objectif(s) principal(aux) et la prestation continue d’avantage multiples (compromis et mesures de sauvegarde révisés régulièrement pour ne pas déstabiliser la SFN).
Critère 7 : les SFN sont gérées de façon adaptative sur la base de données probantes.
Critère 8 : les SFN sont durables et inscrites dans un contexte de compétences approprié (susceptibles de généralisation permettant d’accroître les impacts au-delà de projets autonomes).

6-2 les moyens de diffusion et de montée en compétence au niveau mondial

Les organismes internationaux concernés s’emploient à faciliter la diffusion des SFN en diffusant les expériences et en éditant des guides pédagogiques, notamment sur les méthodes d’évaluation. Un certain nombre de bases de données [6] d’études de cas, de recueils de bonnes pratiques, par type de SFN, par secteur, …sont mises à disposition des maîtres d’ouvrage. Parallèlement le PNUE a lancé des consultations intergouvernementales sur les SFN afin d’établir un état de l’art utile aux décideurs.

La plupart des instances internationales portent intérêt aux SFN : des présentations ont été faites au G20, au G7. La FAO s’est saisie du sujet. Le 7ie rapport d’évaluation du GIEC mentionne leur rôle dans l’adaptation au changement climatique. La Commission européenne a édité un manuel sur l’évaluation de l’incidence des SFN. 41% des nouvelles contributions déterminées des Etats en vue de la prochaine COP Climat mentionnent des SFN. Il existe une coalition pour des Solutions Fondées sur la Nature, codirigée par la Chine et la Nouvelle-Zélande.

Au niveau mondial le PNUE estime que le financement des SFN était récemment 154Mds$ annuels dont 120Mds$ par les membres du G20. Ce sont essentiellement des fonds publics, les financements privés ne représentant que 17Mds$ annuels.

 7 - La diffusion des SFN et la montée en compétences en France

La diffusion des SFN en France repose sur les autorités publiques locales. L ‘OFB (Office Français de la Biodiversité) et l‘ADEME déploient un dispositif pour les y aider. Des sources de financement existent, quoique jugées insuffisantes.

7-1 les collectivités locales en première ligne

Le projet et la mise en œuvre d’une SFN sont assurés par des acteurs locaux ayant la maîtrise du foncier. Parfois ce sont des entités gérant des espaces naturels, Parcs Nationaux, Conservatoires, Office National des Forêts. Dans la plupart des cas la maîtrise d’ouvrage appartient aux collectivités locales.

Les plans d’aménagement des Communautés de Communes tels que les SCOT et PLU ont désormais comme objectif la protection et la remise en état des milieux naturels, de la biodiversité et des continuités écologiques. Elles sont en charge de la prévention des risques naturels. Elles ont la compétence GEMAPI (Gestion des Milieux Aquatiques et Prévention des inondations) depuis 2018.

La GEMAPI a deux objectifs qui contribuent à la restauration d’un fonctionnement hydrologique plus naturel et auto-entretenu : le freinage des écoulements à l’échelle d’un bassin hydrographique, par des retenues, zones d’expansion de crue, ouvrages de rétention, etc… et la protection - restauration des réseaux de zones humides qui facilitent l’infiltration et l’épuration de l’eau tout en étant des réserves de biodiversité et des puits de carbone. Des plans pluriannuels d’entretien et de restauration des cours d’eau et plans d’eau concrétisent ces objectifs. Ceux-ci donnent lieu à des SFN.

Pour les programmer et mener à bien les collectivités territoriales et autres maîtres d’ouvrage agissent en lien avec de nombreux partenaires (par exemple les agences de l’eau pour la GEMAPI), font appel à de nombreuses expertises (hydrologues, naturalistes, experts forestiers, génie écologique [7] , génie civil, experts forestiers, … ), et recourent à des métiers différents n’ayant souvent pas l’habitude de travailler ensemble. Conformément au standard ci-dessus elles doivent associer les habitants et acteurs économiques au projet et à la réalisation. Les choix retenus pour une SFN sont des compromis évolutifs entre ces différents intérêts.

Les SFN doivent faire l’objet d’une gestion rigoureuse, avec, notamment, une évaluation régulière des bénéfices pour le bien être humain et pour la biodiversité, comme on l’a vu ci-dessus dans le standard édicté par l’UICN, ce qui suppose de maîtriser des méthodes de chiffrage nouvelles.

Un délai de montée en compétence sera nécessaire pour mener à bien ces projets multi-acteurs et savoir réunir des financements de sources diverses. Une « mission adaptation », guichet unique d’accompagnement en expertise et ingénierie des collectivités territoriales pour leurs démarches d’adaptation, est prévue par la PNACC3 en 2025.

7-2 le Projet Life intégré Artisan de l’OFB et de l’ADEME

Financé à 60 % par la Commission européenne, le projet Life intégré ARTISAN est piloté par l’Office Français de la Biodiversité. Doté d’un budget total de 16,7 millions d’euros sur une durée de 8 ans (2020-2027), il s’appuie sur 28 bénéficiaires associés (dont l’OFB). Il participe à la mise en œuvre du deuxième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-2) et du Plan biodiversité de la France. Trois objectifs lui sont assignés :

  • démontrer et valoriser le potentiel des Solutions d’adaptation Fondées sur la Nature ;
  • sensibiliser et faire monter en compétences les acteurs sur cette thématique ;
  • accompagner et amplifier les projets de SafN sur tout le territoire national (dont l’Outre-mer).

10 sites pilotes démonstrateurs ont été retenus sur certains thèmes :

  • Baisse de rendement de l’agriculture, intérêt des haies : Communauté de Communes Cingal suisse normande (Normandie).
  • Sècheresse, inondation : Communauté communes St méen Montauban (Bretagne), syndicat mixte des 4 vallées de la Brie (Ile de France).
  • Inondation : syndicat de gestion de l’Eygoutier (Provence Alpes Côte d’azur) , communauté d’agglomération du centre littoral de Guyane.
  • Canicule : Ville des Mureaux (IdF), ville de Lille, métropole du grand Lyon.
  • Cyclone, submersion marine : Communauté d’agglomération du centre de la Martinique.
  • Baisse de rendement des forêts : Parc naturel régional des Pyrénées ariégeoises.
7-3 les financements à disposition

Un objectif commun aux SFN est la prévention des catastrophes naturelles dont le nombre et l’intensité vont croître avec le réchauffement climatique. Les simulations montrent en général que le coût des actions de prévention est inférieur au coût des réparations, et, souvent, les solutions naturelles sont moins onéreuses que les solutions grises.

Le montant cumulé d’indemnisation des catastrophes naturelles a été de 50Mds € depuis 1970. Le coût des inondations est de 560M€ chaque année et France. Il devrait s’accroître de 38% en 2050 avec le réchauffement climatique selon la PNACC3.

L’estimation des besoins de financement de la prévention des risques du réchauffement climatique est encore très lacunaire. Une première estimation incomplète d’I4CE pour la prévention des seules inondations (105 à 130M€/an), de l’érosion du trait de côte (50 à 150M€/an), du retrait-gonflement des argiles (100 à 180M€/an) aboutit à un total de 255 à 460M€/an. A court terme I4CE (Institut de l’Economie pour le Climat) déplore un accroissement insuffisant de 75M€ du fonds Barnier pour atteindre 300M€ en 2025 et la division par deux du Fonds vert pour financer les opérations des collectivités locales, qui passerait de 2Mds à 1Mds entre 2024 et 2025.

L’OFB signale les financements complémentaires des Agences de l’eau, de l’ANCT, de la Banque des territoires, et de CDC Biodiversité pour la mise en œuvre de SFN.

Une difficulté réside dans le fait que les financeurs demandent en général une évaluation des bénéfices monétaires des SFN envisagées. Cette estimation est très difficile s’agissant des gains liés à la prévention des risques et en matière de biodiversité.

 8 - Promesses et obstacles

8. 1 Les promesses

Cet outil que sont les SFN est prometteur à plusieurs titres.
Il permet le développent de processus doublement favorables au bien être humain, ce sont des solutions gagnant (pour les humains) - gagnant (pour la nature). Elles constituent une alternative souhaitable aux techniques encore dominantes d’application à la nature des méthodes industrielles de production de masse conduisant à sa destruction (coupes rases et plantations monospécifiques dans les forêts, élevages industriels, monocultures extensives sous perfusion de produits chimiques en agriculture, …).
La participation à la mise en œuvre locale d’une SFN (incluant selon le standard préconisé toutes les parties intéressées, au premier chef les populations autochtones) aura une vertu pédagogique de compréhension du fonctionnement des écosystèmes et d’inflexion des réflexes prédateurs de la nature.

8.2 Les obstacles

Mais ces effets éminemment positifs seront lents à se produire car il faut compter avec les délais d’apprentissage inhérents à un changement culturel et à la mise en œuvre d’opérations complexes impliquant des expertises diverses et de nombreux acteurs dans la durée. Il faudra aussi du temps pour que les connaissances, souvent lacunaires, sur la vie des écosystèmes se consolident peu à peu à la lumière des expériences partagées.

Un autre obstacle concerne la disponibilité et la maîtrise d’un foncier sain [8]. C’est la raison pour laquelle les maîtres d’ouvrage sont la plupart du temps des acteurs publics.

Les acteurs privés concernés sont au premier chef les agriculteurs et exploitants forestiers. On peut déplorer les résistances tenaces des organisations agricoles dominantes à toute évolution vers des pratiques plus respectueuses de la nature, tenant à des intérêts économiques contradictoires et de court terme.

De même on peut craindre la possibilité d’effets pervers dans l’usage de ces solutions par les intérêts économiques impliqués dans les opérations de restauration. Le CARI [9] dans sa note de retour de la Convention internationale sur la désertification note « il faut saluer la priorité donnée à promouvoir une meilleure gestion des sols, mais il faut espérer que la seule restauration des terres ne soit pas privilégiée sous le prétexte qu’elle semble plus apte à intégrer des modèles économiques de marché. Alors que les dimensions d’évitement ou de réduction des dégradations, bien moins attrayantes financièrement à ce stade et même nuisibles à certains intérêts privés, sont certainement plus prometteuses et surtout peuvent être mises en œuvre directement par les millions de ruraux pauvres et leur profiter".

Enfin, la question du financement reste cruciale pour un déploiement significatif des SFN. Son origine est principalement publique. A cet égard la baisse drastique des crédits du Fonds vert en 2025 en France n’est pas une bonne nouvelle. Concernant les acteurs privés de l’agriculture et de la forêt, une meilleure orientation des aides de la PAC et du plan Forêt serait nécessaire.

La recherche de nouveaux financements de SFN par le biais d’un marché de « certificats/ crédits biodiversité » suscite des réserves. Cela pourrait induire des effets pervers analogues à ceux qui ont été observés dans les marchés carbone, amplifiés par la complexité de la mesure des gains en biodiversité [10].

 9 - Conclusion

Nous sommes encore dans une période d’apprentissage et d’expérimentation dans l’usage de ces Solutions Fondées sur la Nature. Même si elles sont porteuses de beaucoup d’espoir - en ouvrant largement la possibilité d’alternatives aux solutions technologiques - il faudra encore une longue transition pour qu’elles puissent apporter une contribution très significative au développement durable.

°0°

 Bibliographie

* Comité français de l‘UICN : Brochure SFN, 2018,
* UICN : Orientations générales d’utilisation du standard mondial de ‘UICN pour les solutions fondées sur la nature 2020, Nature 2030 programme de l’UICN 2021-2024
* IPBES : le rapport de l’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques , 2019
* ONERC : Des solutions fondées sur la nature pour s’adapter au réchauffement climatique
* WWF : rapport planète vivante 2024
* SNB : stratégie nationale biodiversité de la France
* OFB : Place aux solutions fondées sur la nature
* ADEME : l’adaptation au changement climatique et les solutions fondées sur la nature
* Partenariat Français pour l’Eau : biodiversité aquatique et solutions fondées sur la nature

 A lire aussi dans l'encyclopédie

* Catherine Aubertin – Financer la biodiversité et assurer l’équité entre Nord et Sud- le partage des avantages au fil des COP, N° 302 , Décembre 2024.

* Anne Renault – L’océan face au changement climatique, la surpêche et les pollutions : Comment les sciences marines peuvent nous aider à sauvegarder sa biodiversité., N° 288 , Février 2023.

* Liliane Duport – La biodiversité, une composante de la biosphère, N° 269 , Avril 2020.

* Marie Chéron, Fanny Deleris – Face à l’érosion, quelle gestion durable de la biodiversité ?, N° 172 , Octobre 2012.

* Catherine Aubertin – Les compromis de la Convention sur la diversité biologique, N° 3 , Mai 2006.

Notes

(pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note)

[1Rapport de l’ONERC (Observatoire National sur les Effets du Changement climatique) des Solutions Fondées sur la Nature pour s’adapter au changement Climatique p 21.

[2Les SFN décrites ci-dessous sont, pour la plupart, citées dans le rapport 2019 de l’Observatoire National dur les Effets du Changement Climatique (ONERC)

[3L’objectif de la Stratégie Nationale Biodiversité 2030 est de planter 50 000km de haies d’ici 2030, mais la mise en œuvre semble difficile, le linéaire de haies continue à baisser. 23500km de haies ont encore disparu entre 2017 et 2021 d’après I4CE.

[4Politique Agricole Commune

[5Rapport ONERC p 100

[6The Nature-based Solutions Initiative (NbSI), Global Map of Best Practice Examples, Plateforme Panorama de l’UICN, plateforme Oppla d’études de cas en milieu urbain Oppla Case Study Finder, Portail de solutions d’Adaptation at Altitude, Carte des études de cas d’Urban Nature Atlas (2023), FAO (2018). Nature-Based Solutions for agricultural water management and food security …

[7Ceux-ci ont formé une Association française interprofessionnelle des écologues (AFIE) qui existe depuis 40 ans, Une union professionnelle du génie écologique est à l’origine de la norme NF X10 900 de conduite de projets en faveur de la biodiversité, créant la fonction de coordinateur biodiversité.

[8En effet en présence de pollutions importantes, la mise en œuvre de SFN devient très coûteuse voir impossible

[9CARI plateforme française des ONG suivant la convention « désertification »

[10Voir l’étude conjointe du Museum d’histoire naturelle, de la fondation pour la recherche sur la biodiversité et Carbone 4 : « Certificats biodiversité : risques et opportunités »

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