Les Pôles Territoriaux de Coopération Economique, des leviers pour le développement durable des territoires

19 décembre 2017

Résumé

Les Pôles Territoriaux de Coopération Economique ( PTCE ) viennent renforcer l’Economie Sociale et Solidaire (ESS) et la transition vers un développement durable dans les territoires. Ces coopérations entre les structures de l’ESS, les TPE-PME, et les organismes de recherche permettent de créer des filières et des emplois locaux construisant à petits pas un développement territorial inclusif et résilient. Leur gouvernance démocratique qui s’appuie sur les valeurs de l’ESS impulse un processus solidaire, gagnant-gagnant pour leurs membres et pour leur territoire. Ce mouvement est récent, encore en phase d’expérimentation . Les PTCE ont reçu l’appui des pouvoirs publics. Ils font l’objet d’un suivi et récemment d’une évaluation par le Labo de l’ESS http://www.lelabo-ess.org/enquete-d.... Celui-ci estime à 160 le nombre de PTCE en France et Outre-Mer ; 37 d’entre eux sont lauréats d’un des appels à projets interministériels de 2013 et 2015 et ont reçu un soutien financier.

Auteur·e·s

Lapierre Catherine

Ingénieur de l’école centrale des arts et manufactures, économiste, est membre du secrétariat d’édition de l’encyclopédie du développement durable.


Sultra Camille

Diplômée de la Toulouse School of Economics, intègre le Labo de l’ESS en 2015. Elle est, dans un premier temps, chargée de l’évaluation et de la mesure d’impact des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE), puis, plus largement, de renforcer les actions du Labo de l’ESS dans la transition économique en cours.


 L’ESS et la coopération inter acteurs au service de la vitalité des territoires

En France, tandis que la concentration et la mondialisation économiques accentuaient la dépendance des territoires à l’égard de centres de décisions extérieurs voire étrangers et leur perte d’autonomie, l’ESS connaissait un essor à contre-courant. Entre 2008 et 2013 l’emploi dans l’ESS a augmenté de 0,8% alors qu’il baissait de 0,2% dans le reste de l’économie, il représentait en 2015 10,5% de l’emploi total. Le nombre de ses structures progressait entre 1991 et 2011 au rythme moyen de 3600 par an [1].
Les valeurs et principes de fonctionnement de l’ESS, qui poursuit un objectif de création de valeur pour les hommes et le bien commun, redonne sens au travail et prévoit un réinvestissement des bénéfices dans l’activité, sont un atout essentiel pour fonder un socle économique résilient et durable dans les territoires. Mais la multiplication des structures de l’ESS [2] présentait le risque d’un émiettement. Les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) portent l’espoir que la coopération accroisse considérablement l’efficacité et l’impact de l’ESS. Les PTCE contribuent aussi à réduire la fragilité des nombreuses TPE qui trouvent dans cette coopération un appui pour leur modèle d’affaires. Engagés pratiquement dans la reconquête économique du territoire, ils incitent à une conception renouvelée des politiques publiques.
L’apport de la coopération est la capacité créative induite par la mobilisation des diverses ressources et compétences locales pour construire un développement solidaire et robuste. C’est un processus à rebours des méthodes industrielles de production, basées sur la standardisation de la production de masse et misant sur les économies d’échelle, qui ont produit,dans l’étape récente de mondialisation, le dumping social, l’émiettement géographique de la production et la dépendance des territoires aux aléas des localisations/délocalisations.

  Les PTCE outils pour un développement durable des territoires.

Rejoignant les aspirations des citoyens consommateurs, les initiatives cherchant à mettre en cohérence un projet économique avec la recherche d’un mode de développement plus durable se multiplient. Les PTCE, souvent créés et animés par des structures de l’ESS sensibles aux exigences sociales et environnementales, s’inscrivent dans cette recherche.
Les pratiques des PTCE se basent sur une approche appréhendant simultanément les questions économiques, sociales, culturelles et environnementales. L’objectif est de renforcer le tissu économique local en s’appuyant à la fois sur la demande et sur l’offre : demandes provenant de besoins non satisfaits et offres résultant de ressources locales, notamment humaines ou immatérielles, insuffisamment valorisées.
Les PTCE inscrivent ainsi leur action dans la transition écologique du tissu économique local : mettre en place des processus de production de biens et services plus économes en énergie et matériaux en tendant vers une économie circulaire, répondre efficacement aux besoins sociaux en dépit d’un contexte de pression sur les finances publiques, accompagner l’émergence de nouvelles filières avec des métiers et emplois verts, sensibiliser et inciter les populations au changement de leurs habitudes de consommation, relocaliser des activités économiques. La poursuite de ces objectifs ouvre à un développement à la fois plus sobre matériellement et plus riche en emplois.

Le PTCE Organic’Vallée souhaite créer une boucle locale d’économie circulaire.
Le PTCE s’étend historiquement sur le territoire du Lauragais étendu ensuite à l’aire urbaine métropolitaine de Toulouse. Il est porté par la SCIC Organic’Vallée. Le PTCE rassemble plus de 20 membres autour d’un même projet : des associations Loi 1901, des entreprises du territoire, les collectivités locales, des structures de l’enseignement supérieur et de la recherche ainsi que des acteurs de l’ESS. Les institutions parties prenantes ADEME, communauté d’agglomération, département, … sont conviées aux réunions afin d’être informées du projet.
Le PTCE Organic’Vallée a pour objectif de concrétiser le concept d’économie circulaire sur ce territoire pour la matière organique, le gisement se trouvant en ville tandis que l’usage est à la campagne. En effet, ce sont les zones les plus peuplées qui créent le plus de déchets et ceux-ci sont majoritairement mis en décharge ou incinérés alors qu’après un traitement adéquat ils pourraient être utilisés par les exploitations agricoles dans les zones rurales avoisinantes.
Le PTCE dispose d’un site exceptionnel de 55 ha pour accueillir les activités œuvrant en faveur de cette filière. Dans une première étape, le PTCE a mis en place des formations et sensibilisations des acteurs concernés et du grand public.
Pour en savoir plus : Accéder au site d’ Organic’Vallée : http://www.cler-verts.fr/organic_va...
Le PTCE Clus’Ter Jura crée une dynamique de valorisation des déchets autour de Lons le Saunier.
Juratri créé en 1993 sous forme de SARL, alliance entre une association de lutte contre l’exclusion et des acteurs industriels du déchet s’est transformée en SCOP en 2006. En 2011, Juratri et trois entreprises du territoire ont initié la revitalisation d’une friche industrielle de 30 000 mètres carrés en plein cœur de la zone d’activité de l’agglomération de Lons-le-Saunier. Juratri porte aujourd’hui le PTCE Clus’Ter Jura.
Le PTCE implique 40 partenaires, dont 25 entreprises classiques et 15 de l’ESS, dans la création d’entreprises et d’emplois autour de la gestion et la valorisation des déchets et de l’insertion par l’activité économique.
Pour en savoir plus  : Accéder au site de Clus’Ter Jura  : http://www.cluster-jura.coop/
Le PTCE FigeACteurs anticipe sur l’économie de demain dans la zone d’emploi de Figeac.
Pour rééquilibrer l’économie d’un territoire, dont l’emploi est trop exclusivement situé dans les filières de la mécanique et de l’aéronautique avec une tension dans les autres secteurs, au service des besoins du territoire, 5 acteurs territoriaux ont créé en 2015 une association : FigeACteurs - la Fabrique. Son objet est de « favoriser, développer et mettre en œuvre les coopérations, mutualisations, et synergies entre ses membres ainsi que l’ensemble des acteurs du territoire, afin d’anticiper les activités et compétences de demain ».
Le PTCE, qui implique plus de 60 entreprises, développe son activité et les coopérations dans les domaines de la gestion territoriale des emplois et compétences (accompagnement RH des TPE, RH mutualisée, crèches interentreprises), de l’alimentation et des circuits courts (approvisionnement local de la restauration d’entreprise, traçabilité des produits transformés et distribués - des palettes aux paniers -, insertion par l’activité économique, biodiversité et patrimoine alimentaire), de la transition énergétique (Parc collectif de toits photovoltaïques, Valorisation bois local, Recyclage et sensibilisation à la réduction des déchets, Chantiers environnement).
Pour en savoir plus  : Accéder au site de FigeActeurs : http://www.figeacteurs.fr/

 Les PTCE ont une histoire récente.

Au sein de l’Economie Sociale et Solidaire, le développement des coopérations et des mutualisations dans les territoires a été abordé en2009, lors de la rédaction des « 60 propositions pour une autre Economie » qui préconisait d’expérimenter et de labelliser des pôles de coopération territoriaux. Ce sujet a fait l’objet en 2010 d’un des douze thèmes dégagés des 400 Cahiers d’espérances rédigés pour les Etats Généraux de l’ESS.
Afin de reconnaître et de dialoguer avec les nombreuses initiatives locales, le Labo de l’ESS a élaboré avec les acteurs concernés une charte fédératrice visant à créer une communauté de pôles répondant aux mêmes valeurs de coopération et s’engageant autour de perspectives communes. En 2014, 39 PTCE signaient cette charte à l’occasion de la 2ème Journée Nationale des PTCE. Le Labo de l’ESS décompte en 2017 plus de 60 PTCE signataires.

Charte de la démarche collective des PTCE (extraits)

Valeurs  : « Un pôle territorial de coopération économique s’appuie sur le respect mutuel, la diversité reconnue, la confiance et la convivialité (entre ses acteurs-trices) ». Il reconnaît laco-construction…, il pratique la solidarité en actes aux niveau local et global. Il place au service de son développement la recherche d’innovations sociales. Il recherche la qualité des échanges dans la communication et la transmission d’informations ».
Perspectives : « Créer, consolider et développer des activités, des emplois durables et de qualité, Travailler à l’ancrage territorial des activités économiques, … Adopter une gouvernance démocratique s’appuyant sur des principes d’équité, de réciprocité… associant l’ ensemble des parties prenantes, … ».
Principes d’action partagés  : Développer une culture commune par le partage des connaissances et des savoir-faire, …prendre en compte au mieux les intérêts respectifs des différents membres contributeurs de la démarche collective.

Un travail très important de concertation avec les pouvoirs publics mené avec l’ensemble des acteurs de l’ESS et des collectivités locales, a abouti à la loi relative à l’ESS (juillet 2014). Son article 9 offre aux PTCE une reconnaissance législative et ouvre la perspective d’un développement de ces initiatives grâce à un soutien politique.

Loi relative à l’ESS du 31 juillet 2014, Article 9 :

« Les pôles territoriaux de coopération économique sont constitués par le regroupement sur un même territoire d’entreprises de l’économie sociale et solidaire, au sens de l’article 1er de la présente loi, qui s’associent à des entreprises, en lien avec des collectivités territoriales et leurs groupements, des centres de recherche, des établissements d’enseignement supérieur et de recherche, des organismes de formation ou toute autre personne physique ou morale pour mettre en œuvre une stratégie commune et continue de mutualisation, de coopération ou de partenariat au service de projets économiques et sociaux innovants, socialement ou technologiquement, et porteurs d’un développement local durable ».

 La coopération en construction

La coopération ne se décrète pas. Elle nait et grandit, souvent en dehors des cadres d’action institutionnels, sur la base de l’interconnaissance d’acteurs autour de projets élaborés en commun et partagés. Elle invente, pas à pas, des activités économiques non délocalisables. Ceci explique la lente maturation des PTCE et leur grande diversité.
La dynamique de coopération dans les PTCE est multiforme, expérimentale. Elle se construit à travers la recherche collective et la mise en œuvre d’innovations procurant des avantages mutuels. Ainsi, dans la construction d’une filière territoriale au sein d’un PTCE, la logique classique clients-fournisseurs ou prestataire de services-client aux intérêts divergents s’efface devant la recherche d’un intérêt commun. Elle se nourrit des apprentissages et de la confiance tirés des expériences réussies. Elle demande du temps : les réussites agrégatives ont une antériorité de plusieurs décades : 50 ans pour le pays du Mené, 30 ans pour les fermes de Figeac. La solidarité et la cohésion issues de ces pratiques de coopération dans la durée sont un gage de robustesse et de résilience face aux chocs exogènes.

Le PTCE Sud Aquitaine agrège progressivement depuis 1970 des acteurs économiques divers au service d’un développement inclusif du territoire.
Le Comité de Bassin d’Emploi impulse de longue date une dynamique collective en impliquant progressivement une grande diversité d’acteurs locaux dont la coopération produit un développement territorial inclusif reliant l’économique et le social.
Il compte parmi ses membres des centres de formation, des entreprises d’insertion, 130 entreprises du BTP, du pôle aéronautique créé par le Bassin d’emploi et de la zone industrielle de Tarnos, une pépinière et un hôtel d’entreprises, une association de femmes entrepreneuses, une SCOP dédiée à l’accompagnement de projets, 2 foyers de jeunes travailleurs, un restaurant interentreprises d’insertion. Les collectivités territoriales, les organismes de formation et plusieurs centres de recherche apportent leur appui à ces forces vives.
Cette collectivité a ainsi pu créer des outils permanents d’accompagnement : un centre de formation, deux groupements d’employeurs BTP et multisectoriel, une coopérative d’activités et d’emploi, une société d’investissement en capital risque fondée sur l’épargne de proximité.
Ce PTCE peut à juste titre afficher les objectifs suivants : « favoriser une articulation constante entre les entreprises, le centre de formation et les structures d’accompagnement, outiller le tissu économique dans son développement, développer des mutualisations de réflexion, de services et de projets… ».Tout nouveau projet est mené de façon à impliquer et renforcer ses membres.
Ce PTCE démontre en marchant les fruits de la coopération. « Au départ le PTCE ne recevait que 3 à 5 sollicitations par an pour mener de nouveaux projets, aujourd’hui c’est plus d’une quinzaine » indique Jean Mougenot son coordinateur.

Pour en savoir plus  : Accéder au site du CBE Seignanx : http://www.cbe-seignanx.fr/

La fonction de veille exercée notamment par le Labo de l’ESS, les rencontres et échanges qu’il organise régulièrement, sont essentiels pour saisir les cheminements et les potentiels de ces innovations locales et permettre leur essaimage. Le Labo continue de valoriser et promouvoir les solutions portées par les pôles de coopération dans les territoires à travers ses publications et études, et soutient la création d’une cellule d’animation nationale des PTCE qui soit transversale et permette un suivi quantitatif et qualitatif des PTCE.
L’objectif de coopération des PTCE se distingue de celui des pôles de compétitivité. Alors que ceux-ci ciblent principalement l’innovation technologique et les filières industrielles à haute valeur ajoutée, les PTCE se déploient sur des activités localisées et mettent en œuvre des innovations sociales et organisationnelles, pas uniquement technologiques. Ils valorisent les aspects humains, pas forcément monétaires, que sont la proximité géographique, la vitalité du milieu socio-culturel et favorisent l’entrepreneuriat social.

Organisations en galaxie avec des implications variables de leurs membres, les PTCE présentent différentes modalités de participation et de coopération avec des cercles d’appartenance plus ou moins distanciés. Ainsi, « l’Enquête d’analyse des PTCE » réalisée par le Labo de l’ESS portant sur des données de 2015 et publiée en 2017 sur 50 PTCE a-t-elle pris soin d’interroger, non seulement les 50 cellules d’animation et structures porteuses, mais aussi un deuxième cercle de 345 « membres initiateurs » [3]et 345 autres structures d’un troisième cercle de « membres partenaires internes » [4] , soit au total 740 structures. Les résultats présentés dans cette étude concernent 24 PTCE soit 187 structures.
Les contours d’un PTCE sont à géométrie variable car ils se dessinent à la faveur de projets économiques concrets qui ne mobilisent pas toujours les mêmes entreprises et partenaires. Cela entraîne une pluralité de modalités et degrés de « faire ensemble » permettant des formes d’intégration progressive dans le PTCE.
Les réponses à « l’Enquête d’analyse des PTCE »montrent un degré d’intégration encore faible des membres partenaires du PTCE du 3e cercle d’appartenance. En effet les PTCE sont en mouvement, leurs projets et leurs membres sont en évolution, les différentes observations menées en 2014 [5] et 2015 [6] montrent un accroissement du nombre des parties prenantes y compris pour les PTCE ayant une certaine ancienneté.
Les réponses à « l’Enquête d’analyse des PTCE », évoquent différents types de motivation pour coopérer. Les raisons les plus souvent citées sont :

  • Une raison organisationnelle : relations interpersonnelles, appartenance à un réseau, apport du mode d’organisation du PTCE.
  • Une raison géographique : implantation dans un périmètre géographique restreint
  • Une raison sectorielle : les membres du PTCE appartiennent à un même secteur/ une même filière.

Selon cette enquête, les mutualisations portent en majorité sur le partage de savoirs et d’expériences (79%), de locaux (58%) ou d’autres moyens matériels (44%). La mutualisation financière (27%) est plus rare, la mutualisation de la communication extrêmement rare (2%).
La gouvernance et l’animation des PTCE, principalement assurée par des structures de l’ESS (SCIC, associations, coopératives), se conforment aux valeurs de l’ESS [7] .
Le statut de SCIC est particulièrement adapté pour instaurer la gouvernance inclusive multi-acteurs et démocratique recherchée.

Les Sociétés Coopératives d’Intérêt Collectif (SCIC)

Institué par la loi de juillet 2001, le statut de SCIC permet la participation aux décisions et au capital de sociétaires de différentes catégories. Le multi-sociétariat est au cœur du statut des SCIC. C’est ce qui fait l’originalité de ces coopératives qui peuvent associer au capital, à sa gestion, au développement de son activité, toutes les parties prenantes : salariés et bénéficiaires (2 catégories d’associés obligatoire), mais aussi des collectivités territoriales et des bénévoles. Ce statut connaît un fort succès avec une centaines de créations annuelles.
Fin 2016 leur nombre était de 600.

 Des activités multiples adaptées aux besoins et richesses du territoire

Dans la stratégie de développement des PTCE la valorisation des ressources territoriales est privilégiée. Les logiques sectorielles et de filières mises en place relèvent d’impératifs de revitalisation et visent la constitution de circuits économiques autocentrés, participant ainsi à une transition vers un développement durable.
Guidés par l’exploration de pistes de développement territorial à partir de l’expérience des fondateurs, les PTCE s’adonnent rarement à une production mono-sectorielle. Si quelques PTCE s’organisent autour de métiers proches ou complémentaires ( Resto Passerelle, Initiatives et Cité, Culture et Coopération, Coursive Boutaric ), la logique de coopération les amène vite à compléter pour agréger une filière ( Bio pour tous ) et beaucoup sont multi-activités.

Le PTCE la Bio pour tous crée dans les Hautes Pyrénées une filière de produits bio accessibles à tous.
La création de GAB65 pour promouvoir la bio dans les Hautes Pyrénées remonte à 1998. Il mène des ateliers de sensibilisation du grand public, puis suscite, en 2004, des chantiers agricoles d’insertion, la création d’une SCIC « resto bio » distribuant des produits bio aux professionnels de la restauration collective. En 2010, il contribue à la structuration d’une filière de viande bio avec la coopérative AltiPyrénées . En 2013 il crée la SCIC l’Odyssée d’Engrain de transformation de variétés anciennes de céréales cultivées dans le territoire en pâtes alimentaires. L’expérience parallèle des ateliers culinaires pour les familles accueillies par le secours populaire depuis 2011 conduit à la création du PTCE en 2015 pour fédérer les acteurs de la bio et ceux de la solidarité dans le département.
Le PTCE associe tous les acteurs de la chaîne alimentaire, 147 producteurs bio sur plus de 3000ha, il a contribué à la création ou au maintien de plus de 300 ETP en agriculture, et 50 ETP dans les associations membres. Il a formé 700 personnes à l’introduction du bio dans la restauration collective.
Pour en savoir plus  : Accéder au site de la Bio pour Tous : [http://www. gab65.com/]

De nombreux membres de PTCE développent des fonctions transverses relevant du développement local et durable, de l’ingénierie, de l’accompagnement et de l’incubation d’activités, de la formation professionnelle, de la sécurisation des parcours professionnels et de l’insertion (IAE, GEIQ, CAE [8] ).

Le PTCE InnoVales en Isère, un outil pour le rebond d’une vallée des Alpes.
Suite à la crise de 2008-2009 qui a mis à terre la mono-industrie du décolletage, l’association Alvéolea mobilisé les acteurs locaux pour rechercher des voies de diversification. Elle a ainsi contribué à la création d’une plateforme de l’écoconstruction et du bois qui monte une filière d’éco-matériaux, dont le bois, et suscité des centres de ressources pour la montée en compétence des habitants et l’accompagnement de porteurs de projet.
Le PTCE implique la société civile, les entreprises et financeurs, il réunit tous les acteurs concernés dans les domaines de la formation professionnelle, du développement économique ainsi que les collectivités territoriales.
Pour en savoir plus  : Accéder au site d’InnoVales  : http://innovales.fr/

« L’Enquête d’analyse des PTCE » indique que 24% d’entre eux agissent dans le secteur des éco-activités, 24% dans les activités liées à l’emploi, 20% dans l’alimentation et l’agriculture durable, 19% dans le domaine de la culture et des industries créatives, 18% dans les services aux entreprises, et 12% dans celui des services à la personne. Cette même enquête précise que 46% des PTCE déclarent coopérer au sein d’une filière pivot [9] , 29% autour de plusieurs filières, 17% autour de deux filières connexes [10] , 12% dans un ensemble de multi-activités.
Les courtes monographies de PTCE présentées en encadré dans cet article montrent la diversité des activités prises en charge et des cheminements.

Le PTCE Village documentaire de Lussas en Ardèche étend son rayonnement grâce à l’agrégation d’une filière du film documentaire.
Une douzaine d’acteurs du film documentaire d’auteurs (dans les domaines de la production, de l’édition, de la distribution, de la diffusion) installés à Lussas se sont regroupés en PTCE en 2012.
Coopèrent ainsi, avec le soutien d’institutions publiques, l’association « Ardèche images » qui organise des Etats généraux du film documentaire attirant 6000 festivaliers, la « Maison du doc » qui propose une base documentaire de 40 000 films et une vidéothèque professionnelle de 17 000 films. Avec d’autres membres du PTCE elles ont créé la SCIC « Tënk  » qui contribue au rayonnement du film documentaire d’auteur de langue française, avec une vidéothèque accessible en ligne. Le PTCE dispense des formations et essaime à l’international sur tous les continents. Il soutient les jeunes auteurs.
Pour en savoir plus  : Accéder au site de Village Documentaire de Lussas :http://www.lussasdoc.org/

 Les membres des PTCE, en majorité des entreprises de l’ESS mais aussi des PME, TPE, sont en général de taille modeste

Les entreprises de l’ESS sont au cœur de la genèse et du pilotage des PTCE, elles sont aussi au cœur de l’animation et de la prise de décision. Les associations constituent le principal contingent des organisations membres des PTCE, Le statut associatif est celui de 57% des structures présentes dans l’échantillon d’analyse de « l’Enquête d’analyse des PTCE ». Les SARL et les SCIC sont loin derrière avec respectivement 9% et 8% de structures représentées. Suivent les collectivités territoriales (7%). Les structures de l’insertion par l’activité économique représentent 23% des structures de cet échantillon.
Les entreprises hors ESS sont bien présentes dans les PTCE mais davantage comme parties prenantes que comme acteurs pivots. Si, selon « l’Enquête d’analyse des PTCE », elles représentent en moyenne 18% des organisations membres, elles sont encore peu nombreuses dans le second cercle des « membres initiateurs ». À quelques exceptions près, les entreprises hors ESS sont des PME, voire des TPE.
Les PTCE regroupent généralement des structures de taille modeste, les organisations de moins de 10 salariés représentent les deux tiers, voire les trois quarts des membres des PTCE. La petite taille des membres tend à conforter l’hypothèse que les PTCE constituent « des réponses appropriées au problème identifié de l’émiettement des petites structures de l’ESS ». Le regroupement ouvre à des opportunités de développement territorial, à un réseau de compétences et à des fonctions support auxquelles chacune des entreprises constitutives n’aurait pas accès individuellement. Certains PTCE jouent le rôle d’incubateur d’entreprises assumé : plutôt que de voler de leurs propres ailes une fois créées, les activités et entreprises restent membres du groupement au-delà de la phase d’émergence.

Le PTCE Domb’innov pour le développement social et l’emploi dans son territoire.
L’association Val Horizon Groupe d’Entreprises Sociales toutes à vocation sociale, éducative ou encore d’insertion par l’activité économique, après avoir connu un développement endogène durant 20 ans, a proposé au territoire d’investir collectivement dans la promotion de l’économie sociale puis de coopérer pour la création de nouvelles entreprises sociales.
Son territoire d’intervention est le Val de Saône, la Dombes et s’étend à la Côtière de l’Ain, de Miribel à Montluel.
Le PTCE est gestionnaire de dispositifs sociaux (Petite Enfance, Centre sociaux, Ateliers et chantiers d’insertion, etc.) et de services à la personne et à la création d’entreprises (incubation). Il propose des services aux entreprises pour créer des boucles d’économie circulaire.
19 entreprises sociales sont impliquées dans la coopération, il s’en crée une nouvelle chaque année.
Pour en savoir plus  : Accéder au site de Domb’innov  : http://www.dombinnov.fr/

Les organismes de recherche et universités restent une partie prenante peu visible au sein des PTCE à l’exception de l’Institut Godin et l’Institut Novetat, respectivement membres historiques des PTCE du Pays de Bray ou du Périscope. Mais de nombreuses collaborations ponctuelles avec les chercheurs sont mises en œuvre. Plusieurs PTCE se positionnent sur une activité de recherche à partir de l’expérience de terrain : PTCE Tetris et Matières et Couleurs du Lubéron. Certains instaurent et gèrent des lieux de création collective que sont les fablab , ou même les espaces de « coworking » : PTCE Les imaginations fertiles à Toulouse.

Le PTCE Matières et couleurs du Luberon valorise le patrimoine territorial des couleurs naturelles.
En 1994 est créée l’association « Ôkhra », entreprise économique et culturelle sur le thème des ocres et de la couleur, à laquelle s’associe le Parc naturel régional du Luberon. Les communes ocrières sont incitées à réhabiliter leur patrimoine industriel et paysager. En 2004, « Ôkhra » fédère plus de 400 adhérents intéressés par tous domaines de la couleur et reçoit plus de 20 000 visiteurs par an, lui permettant de s’autofinancer à 95%, elle adopte le statut de SCIC. Aujourd’hui la SCIC réunit plus de 200 coopérateurs : les fondateurs, les salariés, les intervenants, des clients, des fournisseurs, des bénévoles, de nombreux experts et entreprises de la filière couleur, la région Provence Alpes Côte d’Azur, le Parc naturel régional du Luberon et plusieurs communes.
Le PTCE organise des circuits touristiques immersifs, suscite des évènements festifs, en relation étroite avec les artisans et les opérateurs du tourisme. A partir de ce socle le PTCE poursuit divers autres axes de développement : une activité de recherche et développement, « Chimie verte & Color Labs » qui combine innovation technologique et méthode collaborative celle-ci sert de base au projet d’école « Lumière, couleurs et enjeux de société » ; le développement commercial des productions « Matières et couleurs du Luberon  » avec pour objectif de structurer une gamme de produits beaux-arts/artisanat-décoration du Luberon, basée sur les productions actuelles et à venir des opérateurs du PTCE. Grâce au partage des connaissances le PTCE souhaite proposer des formations plus adaptées à qualifier les personnels et les candidats à l’emploi des acteurs économiques concernés par les matières et couleurs durables.
Le PTCE développe aussi de nouveaux modes collaboratifs et productifs pour entrer dans une démarche d’économie circulaire, de circuit court, de réemploi de déchets, d’achats communs et de moyens mutualisés de distribution.
Pour en savoir plus  : Accéder au site de Matières et Couleurs du Luberon : http://okhra.com/cooperative-okhra/ptce/

 PTCE et collectivités territoriales : une interaction facteur d’innovation

L’implication des Collectivités Territoriales est un accélérateur pour l’émergence et le développement des PTCE. Certaines régions comme Rhône Alpes, Champagne-Ardenne, le Nord Pas de Calais étaient très favorables à la formation de Pôles Territoriaux de Coopération Economique. Par exemple la région Champagne-Ardenne avait conçu une ligne de financement qui octroie une subvention à des projets de coopération territoriale et dont l’objectif est de faire émerger des activités socialement innovantes et porteuses de développement et d’emplois.
L’appui des collectivités locales peut revêtir différentes formes. Elles peuvent figurer parmi les organisations fondatrices du PTCE (le SICOVAL pour Périscope), être acteur de sa réorientation (la MEL pour Lille MétroPôle Solidaire ), ou encore propriétaires du lieu mutualisé (Toulouse Métropole pour La Serre). Elles apparaissent plus souvent dans un second que dans un premier cercle d’appartenance.
Membres du comité de pilotage, membres de droit du CA d’une association, sociétaires du collège partenaire d’une SCIC, etc., plusieurs PTCE cherchent la bonne formule qui reconnaîtrait la place incontournable des collectivités locales tout en évitant de devenir un simple dispositif ou instrument d’une politique de développement économique local.

Le PTCE Mobilité du bassin d’emploi du Havre , une alliance entre structures de l’ESS au service de la mobilité de publics en difficulté.
Ce PTCE organisé en SCIC réunit un acteur de la formation, une auto-école associative, un garage solidaire et des possibilités de location de moyens de mobilité à bas coût. Il accompagne des personnes en difficulté. La mutualisation des ressources et des moyens est réalisée en partenariat avec les collectivités locales et les entreprises du bassin d’emploi. Le périmètre d’action du PTCE couvre une zone dans laquelle la mobilité est une problématique majeure.
Le parcours commence par un « bilan de compétences mobilité » sur prescription d’un référent, conseiller pôle emploi ou mission locale, assistante de service social, …Il s’agit d’identifier les besoins et de définir des solutions de mobilité à court et moyen terme en lien avec le projet personnel et professionnel. Une formation à la mobilité (ateliers collectifs pour l’apprentissage du code de la route, …) délivre un accompagnement spécifique. FODENO le Havre, centre de formation professionnelle pour adultes sous statut associatif spécialiste des publics en difficulté, se charge de ces deux étapes.
Un garage solidaire, entreprise d’insertion agréée accueille des salariés, des chômeurs de longue durée et des bénéficiaires des minimas sociaux, encadrés et formés par un chef d’atelier, professionnel d’expérience. Ce garage propose un service de location de véhicules (automobiles et scooters) ouvert à tous avec tarification sociale et la vente de véhicules entretenus et révisés à petit prix. En soirée et le Week end les adhérents de l’association peuvent réaliser eux-mêmes l’entretien de leur véhicule à petit prix avec les outils et les conseils de bénévoles compétents.
Pour en savoir plus  : Accéder au site du Pôle Mobilité du Bassin d’Emploi du Havre :http://pole-mobilite.org/

Réciproquement la présence des PTCE invite les pouvoirs publics à une réflexion sur leur conception du développement territorial. Dans certains cas leur succès a conduit les collectivités territoriales à enrichir et à affiner leur programme de développement socio-économique, en intégrant dans leur réflexion cette approche collaborative. Leur conception du développement intègre aussi progressivement une prise de responsabilité concrète de la société civile et évolue vers une vision renouvelée du développement local intégrant les dimensions solidaire et durable.
Par ailleurs les PTCE, qui ont par nature un fort ancrage territorial, ne recouvrent pas forcément les périmètres institutionnels. Les réponses des PTCE à « l’Enquête d’analyse des PTCE » indiquent que La zone administrative la plus proche du périmètre des 24 PTCE se situe au niveau de l’agglomération pour 42% des réponses, du pays pour 33% et du bassin d’emploi pour 29% d’entre elles. 79% des PTCE ont un périmètre infra-départemental, 17% un périmètre interdépartemental et seulement 4% un périmètre départemental.

  Des résultats déjà positifs sur l’emploi

Comme le stipule la charte des PTCE, les objectifs visés par les pôles sont notamment de :

  • « Créer, consolider et développer des activités, des emplois durables et de qualité, au bénéfice de son territoire et de ses habitants ;
  • Travailler à l’ancrage territorial des activités économiques, dans un espace caractérisé par la coopération entre parties prenantes ».

Ainsi, au-delà des résultats financiers propres, l’impact économique des PTCE s’apprécie de façon qualitative : le PTCE a-t-il permis de renforcer l’économie territoriale en développant des activités et créant des emplois sur place dans une perspective de développement durable ?
L’impact le plus marquant, au terme d’une courte période d’expérimentation 2009-2015 [11] , concerne l’emploi.
En effet 70% des structures à l’origine de la création des PTCE sont des structures de l’Insertion par l’Activité Economique.
Les PTCE leur permettent d’aboutir à des dynamiques renforcées de création d’emplois de qualité en coopérant avec les petites entreprises du secteur concurrentiel, en incorporant les innovations juridiques que sont les Groupements d’Employeurs, les Coopératives d’Activité et d’Emplois qui contribuent à sécuriser les emplois locaux et en créant des filières de production solides répondant aux besoins des parties prenantes.

SIAE, GE, CAE, tiers lieux coopératifs, des innovations de l’ESS pour la création et la sécurisation des emplois.

Les structures d’Insertion par l’Activité Economique (SIAE) permettent de rendre « employables » des personnes éloignées de l’emploi fonctionnent sur la base d’un contrat de travail à financement mixte, semi-public semi-marché. Elles sont présentes dans les activités utiles au développement durable dans les territoires (recyclage, biodiversité, protection de l’eau, circuits courts alimentaires, services aux personnes et aux entreprises, …), sont au nombre de 5 000, insèrent plus de 200 000 salariés et emploient 50 000 encadrants et gestionnaires.
Les Coopératives d’Activité et d’Emploi (CAE) proposent aux indépendants un modèle coopératif et mieux protégé. Ils bénéficient d’un accompagnement personnalisé, de services mutualisés (gestion administrative, fiscale et comptable) et d’un Contrat d’Entrepreneur Salarié Associé (CESA) à durée indéterminée assimilé au salariat. Bénéficiant d’une protection sociale de salarié (sur la base du revenu tiré de leur activité), les associés indépendants peuvent développer des projets communs, participent à la gouvernance de la coopérative et financent, proportionnellement à leur CA ou marge brute, les services mutualisés. Exemples : les CAE « Coop’Alpha et Coop&bât » en Aquitaine, les CAE « Coopaname », « Oxalis  », « Grands ensemble  » et le regroupement « Bigre  » en région parisienne.
Les Groupements d’Employeurs (GE) mettent à disposition d’entreprises qui y adhèrent des salariés partagés bénéficiant d’un contrat unique. Ils sont un antidote au développement des emplois précaires (CDD, Intérim). 3900 GE agricoles et ruraux emploient 22000 ETP (Equivalent Temps Plein), soit 10% de l’emploi salarié agricole, 1000 autres GE divers incluent une forme particulière, le GEIQ, qui embauche des publics en difficultés mis à disposition des entreprises adhérentes en alternance avec des apprentissages théoriques et pratiques.
Les tiers lieux coopératifs ou associatifs, espaces de coworking, fablabs, permettent à des actifs majoritairement non-salariés de coopérer au cours d’apprentissages, de débats, de projets communs. Créés au sein de l’ESS, Il importe d’entretenir leur potentiel coopératif.

Les PTCE Sud’Aquitaine et Domb’Innov combinent tous ces leviers pour créer une dynamique économique locale de sécurisation et de création d’emplois. Les PTCE deviennent ainsi de véritables incubateurs d’entreprises, particulièrement dans le secteur de l’ESS.

Le PTCE Sud Aquitaine développe toute la gamme des outils de l’ESS en faveur de l’emploi.
Tournant le dos aux licenciements massifs des années 70, le Comité de Bassin d’Emploi voulait saisir les opportunités liées à la forte croissance démographique et à la diversification économique accompagnant la présence de grandes entreprises sur le territoire. En fédérant depuis 2014 les acteurs locaux de différents horizons, il construit un développement économique inclusif basé sur les besoins et les ressources inexploitées du territoire.
Il déploie des projets sur cinq thèmes : la formation, la création d’activités, l’accompagnement des porteurs de projets, la R&D animation territoriale. Dans l’optique de sécuriser et développer des formes hybride d’emplois il a créé deux Groupements d’Employeurs, un GE multisectoriel et un GEIQ ayant un conseil d’administration commun, un centre de formation industrie et trois Coopératives d’Activités et d’Emploi (CAE) regroupés en SCIC avec un tiers lieu pour porteurs de projets et coworking, un fonds de finance solidaire.
Le PTCE qui fédère ces acteurs avec des artisans et deux entreprises d’insertion, a développé de l’écohabitat, de l’aide à la mobilité pour les demandeurs d’emploi et travailleurs en insertion (prêt de véhicules à bas coût), des circuits courts agricoles (légumerie, projet territorial de restauration collective) …
Pour en savoir plus : Accéder au site du CBE Seignanx : http://www.cbe-seignanx.fr/

Outre les emplois propres ou partagés au sein du PTCE, ainsi que les emplois créés ou consolidés pour chacune des structures membres du fait des interactions, il y a des effets emplois induits par les activités des PTCE. En effet, aux ETP cumulés des membres du PTCE, il convient d’ajouter l’ensemble des postes d’insertion des SIAE (structures d’insertion par l’activité économique), des contrats de professionnalisation des GEIQ (groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification)ou des entrepreneurs-salariés des CAE (contrats d’accompagnement dans l’emploi). Par exemple, les GEIQ Bâtiment et Interpro de Pôle Sud Aquitaine ont généré près de 260 contrats de professionnalisation en 2017 mis à disposition des entreprises membres. En 2016, les SIAE de Domb’Innov totalisent plus de 238salariésen insertion et 14 en parcours de professionnalisation. La CAE Grand Ensemble, membre de Lille MétroPôle Solidaire, regroupe 300 entrepreneurs salariés.

Le PTCE RestoPasserelleagrégateur de restaurants sociaux en Seine Saint Denis.
Depuis 2003 plusieurs cuisines informelles d’anciens foyers de travailleurs migrants devenus résidences sociales ont été transformées en « restaurants sociaux légalisés ». Distribuant des repas à un prix très bas Ils contribuent aussi à l’insertion professionnelle de leurs salarié(e)s issu(e)s de populations très précarisées.
En regroupant ces restaurants sociaux le PTCE apporte :

  • Une mutualisation de la gestion des personnels et de leur formation ;
  • Une mutualisation d’outils de gestion et des procédures règlementaires ;
  • Des ressources en équipements techniques ;
  • Une gestion mutualisée des achats et prestataires de services.



Le PTCE se développe en incorporant progressivement les restaurants sociaux de la région.
Pour en savoir plus  : Accéder au site de Resto Passerelle :http://www.resto-passerelle.org/

Au-delà des postes d’insertion et des contrats de professionnalisation, nombre de PTCE comptent des résidents qui créent leur propre emploi. Coworking, fablab, pépinière sont autant d’espaces animés et accueillis au sein de plusieurs PTCE qui hébergent des créateurs, des entrepreneurs ou des artisans dont les projets bénéficient des opportunités de coopération et de mutualisation proposées.
Par exemple, le PTCE La Serre compte une quarantaine de résidents des espaces de coworking et du Fablab et anime un réseau de 80 artisans et designers. InnoVales se présente aussi comme un tiers lieu (incubateur, co working, atelier technique partagé et projet de Fab Lab). Un des projets phares du PTCE du Pays de Bray est l’installation en cours d’une pépinière d’artisans offrant un atelier de travail, une mutualisation de services, des parcours de formation et des collaborations pour répondre collectivement à des appels d’offre.
Les PTCE qui n’ont pas pour origine l’insertion par l’activité économique, mais agissent dans le domaine de la culture, ou s’attachent à créer une filière de production locale en fédérant et suscitant les acteurs qui y contribuent, ou sont engagés dans le soutien aux créateurs d’entreprises (cf. PTCE les imaginations fertiles Toulouse) ont également un impact positif sur l’emploi, comme conséquence du renforcement ou de la création d’activités.
Une forte proportion des membres de PTCE ayant répondu à « l’enquête d’analyse des PTCE »fait état d’effets bénéfiques sur les ressources humaines quant à la qualité des relations professionnelles (59%), la mobilité (49%), une meilleure gestion des emplois (41%), de l’organisation de formations (33%).
Les 115 structures ayant répondu sur ce point à « l’enquête d’analyse des PTCE »comptabilisent 2194,8 ETP (équivalent temps plein) dont 10,4% directement affectés aux activités du PTCE. Les structures comptant le plus grand nombre de salariés sont inscrites dans le domaine des services aux entreprises et des services à la personne (respectivement 35,8 ETP et 47,5 ETP en moyenne). Les secteurs de l’alimentation et de l’agriculture durable, de la culture et des industries créatives comptent les structures de taille plus petites (respectivement 19,8 ETP et 8,8 ETP salariés en moyenne).De plus ¾ des PTCE ayant répondu à l’enquête bénéficient d’un appui bénévole.
Concernant leur impact économique plus large, les réponses à « l’Enquête d’analyse des PTCE »montrent qu’une majorité des membres de PTCE (55%) considèrent que celui-ci a permis de « développer des réponses collectives innovantes pour répondre aux besoins des entreprises et des citoyens ». Elles précisent que la concentration d’acteurs a entraîné une complémentarité et rendu possible une offre de services plus large et plus complète (59%), a permis de mieux répondre aux besoins du territoire grâce à la complémentarité des filières du pôle (46%), et une plus grande capacité d’innovation (42%).
Concernant leurs résultats propres, les ressources financières totales des 24 PTCE ayant répondu à l’enquête d’analyse sont à 60% du chiffre d’affaires et à 18,5% des aides publiques et privées (subventions directes, aides à l’emploi, mécénat) [12] . La proportion modeste des aides, alors que l’on se situe dans un moment de décollage et d’expérimentation, est de bon augure. Les structures des 2ie et 3ie cercle estiment que le PTCE a généré en moyenne 8,4% de leur chiffre d’affaires ce qui démontre l’intérêt financier de la coopération.

 La coopération, une voie d’avenir pour le développement durable des territoires

Il est trop tôt pour dresser un bilan de la contribution des PTCE au renforcement des économies territoriales vers un développement durable, ils sont encore en émergence et en pleine évolution. Mais d’ores et déjà les expériences mises en œuvre démontrent la productivité de la coopération.
La coopération entre structures de l’économie sociale est un remède certain à l’émiettement de ce secteur et leur coopération produit plus que leur simple addition. Mais, au-delà, on peut déjà affirmer que le développement et la pérennisation des PTCE amorce une reprise en main de l’économie territoriale par les acteurs locaux et la construction de manières de produire permettant un développement durable.
A côté d’autres hybridations entre l’économie sociale et l’économie classique (à l’initiative d’entrepreneurs individuels soucieux de l’intérêt général ou de partenariats entre de grandes entreprises et les structures de l’ESS) décrites par l’étude « accompagner l’essor d’un entrepreneuriat de territoire », les PTCE relèvent le gant. Leur modèle économique en pleine expérimentation est encore fragile, Ils méritent le soutien des collectivités territoriales, car ils construisent un avenir conforme à l’intérêt général.
En instituant des collaborations entre des structures de l’économie sociale, des PME et des acteurs publics, autour de projets productifs pour chaque composante et pour le territoire, les PTCE contribuent à préfigurer ce développement inclusif et durable, au service des hommes de maintenant et des générations futures, que l’opinion appelle de ses vœux.
De plus les PTCE répondent à une aspiration largement répandue de participation citoyenne concrète à l’élaboration de solutions locales pour surmonter les crises économique, sociale et environnementale.

Notes

(pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note)

[1Source panorama 2015 du CNCRES.

[2Témoignage de Stéphane Montuzet du PTCE : On est passé de 45 structures ESS il y a 20 ans à 150 aujourd’hui sur le territoire .

[3Les membres initiateurs sont définis comme les structures ayant eu un rôle déterminant dans l’élaboration, la création et le développement du PTCE.

[4Les membres partenaires internes sont définis comme les structures s’étant associées au PTCE après sa création, et étant actuellement impliquées dans l’élaboration et le développement de projets dans le cadre du PTCE.

[5Eléments de caractérisation des PTCE, Laurent Fraisse, avril 2014.

[6Caractérisation des Pôles Territoriaux de Coopération Economique : premiers résultats, Laurent Fraisse, octobre 2015.

[7 “ L’Economie sociale et solidaire regroupe un ensemble de structures qui reposent sur des valeurs et des principes communs : utilité sociale, coopération, ancrage local adapté aux nécessités de chaque territoire et de ses habitants. Leurs activités ne visent pas l’enrichissement personnel mais le partage et la solidarité pour une économie respectueuse de l’homme et de son environnement " - (site du labo de l’ESS).

[8Insertion par l’Activité Economique, Groupements d’Employeurs pour l’Insertion et la Qualification, Coopératives d’Activité et d’Emploi.

[9Filière regroupant les activités majoritaires du PTCE ou des structures.

[10Filière complémentaire à la filière centrale de la structure.

[11L’enquête publiée en 2017 porte sur les réponses des composantes des PTCE datant de 2015.

[12Les 21,5% restants qualifiés d’autres ressources financières concernent l’ensemble des éléments financiers restants (cotisation, dons, produits financiers, etc.).

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 Bibliographie

* Labo de l’ESS : Actes de la 2ie journée nationale des PTCE 19 septembre 2014
* Laurent Fraisse : Les Pôles Territoriaux de Coopération Economique, septembre 2014
* Laurent Fraisse : Eléments de caractérisation des PTCE, , avril 2014
* Laurent Fraisse : Caractériser les Pôles Territoriaux de Coopération Economique Premiers résultats, 2015
* Labo de l’ESS : Enquête d’analyse des PTCE 2017
* Territoires conseils : Étude “accompagner l’essor d’un entrepreneuriat de territoire » 2017
* Rapport du labo de l’ESS : « transformer l’emploi, redonner du sens au travail » 2017

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