Résumé
La prise de conscience brutale de l’extrême gravité du changement climatique et du déclin de la biodiversité a donné - avant la pandémie - un écho considérable à l’hypothèse d’un effondrement à un horizon relativement proche des systèmes socioécologiques et à la collapsologie. Celle-ci a des aspects multiples : à la fois volonté de créer un choc émotionnel, vision idéologique du monde futur, nouvelle science et prévision sur l’avenir. Seules les deux dernières dimensions sont abordées ici car il s’agit essentiellement de resituer la place de la prospective dans le débat sur l’effondrement, et de voir en quoi celle-ci se différencie de la collapsologie à la fois sur le plan épistémologique et de ses hypothèses sur le futur. Si l’interrogation sur les risques d’effondrements – au moins partiels - est légitime, ni les raccourcis qu’emprunte la collapsologie pour annoncer leur réalisation prochaine, ni l’attitude de mise en retrait qu’elle préconise pour y faire face ne se justifient. Moins fataliste et catégorique, la prospective, art pratique orienté vers l’action, préfère se situer entre deux extrêmes qu’elle refuse : le déni de l’hypothèse catastrophiste et la certitude de sa venue. Mais elle doit nous aider à sortir de la « panne de futurs » qui freine la mise en place de solutions de rupture indispensables pour faire face à la crise écologique.
Auteur·e
Jacques Theys, vice-président du Plan Bleu pour la Méditerranée, a été enseignant à l’École des hautes études en sciences sociales, responsable de la prospective au ministère du Développement durable et directeur scientifique de l’Institut français de l’environnement (IFEN). Il est l’auteur de nombreux articles et ouvrages sur le développement durable, notamment, dans cette revue : « Le développement durable face à sa crise : un concept menacé, sous-exploité ou dépassé ? » (2014) et « L’approche territoriale du « développement durable », condition d’une prise en compte de sa dimension sociale » (2002).
Vice-président de la Société Française de Prospective
- .
Une première version, sensiblement différente, de cet article a été publiée en avril 2020 dans le numéro 98 de la revue « Responsabilité Environnement » (Annales des Mines) – consacré au thème de la catastrophe.
Modifié fin 2021, ce texte n’intègre pas la guerre en Ukraine et ne parle que marginalement de la pandémie liée au COVID 19 .
L’effet de sidération lié à prise de conscience brutale de l’extrême gravité du changement climatique et du déclin rapide de la biodiversité, a donné un écho considérable – au moins jusqu’à la pandémie - à l’hypothèse d’un effondrement prochain des systèmes socio – écologiques dans lesquels nous vivons, et aux thèses développées à ce sujet par les « collapsologues ». En 2019 six français sur dix se disaient ainsi convaincus « qu’un effondrement de la civilisation est possible » - en raison d’abord de l’effet de serre, mais aussi de la démographie, de l’accroissement des inégalités ou du nucléaire [1] . A partir de la publication en 2015 du livre « fondateur » de Pablo Servigne et Raphael Stevens « Comment tout peut s’effondrer », il n’est pas un seul média qui n’ait consacré à cette hypothèse au moins un article ou une émission – sans oublier les séries télévisées – ce qui permet de dire qu’il s’agit d’un véritable phénomène de société – s’étendant bien au-delà du cercle des experts et des écologistes.
C’est essentiellement en France que les débats se sont ouverts sur ce sujet, mais la question a été perçue et discutée dans beaucoup d’autres pays ou lieux de réflexion [2] - et dans une perspective qui va au-delà des préoccupations pour le climat ou l’environnement. C’est ainsi qu’en septembre 2019 l’OCDE a organisé une importante conférence ayant pour thème « Averting sytemic collapse » - avec pour objet d’évaluer l’éventualité de nouvelles crises financières, écologiques, géopolitiques ou sociales et de discuter de l’hypothèse d’un effondrement lié à leur conjonction ou à des effets en chaine (« cascading effects ») [3] . Cette préoccupation est également de plus en plus présente dans la plupart des instances internationales qui travaillent sur les risques à l’échelle globale avec des groupes de travail ou des études qui sont lancées sur les risques systémiques, les catastrophes en chaine, ou la résilience aux chocs extrêmes [4] .
L’objet de cet article n’est pas de discuter sur le fond de l’hypothèse d’un effondrement ni même de faire une critique détaillée des arguments utilisés par les collapsologues pour annoncer que celui-ci est prévisible à un horizon proche. Il est encore moins de faire une histoire, une sociologie ou une critique idéologique des mouvements effondristes [5] . Il s’agit, de manière beaucoup plus modeste, de resituer la place de la prospective dans le débat sur la collapsologie envisagée comme une des formes parmi d’autres d’appréhension du futur - puisque c’est du futur dont il s’agit. Le paradoxe est en effet que cette prospective a joué – notamment à travers le rapport du Club de Rome - un rôle important dans la structuration de ce que les collapsologues considèrent comme une « science de l’effondrement », alors qu’elle ne s’est jusqu’à présent ni avancée ni a été sollicitée sur cette perspective. Entre les collapsologues, les spécialistes du risque ou des systèmes complexes, ceux de l’économie, de la géopolitique ou de l’environnement - mais aussi la philosophie morale de Hans Jonas ou Jean Pierre Dupuy - quel peut être son apport spécifique éventuel ? C’est la question posée ici.
Se poser la question d’un possible effondrement n’est pas seulement une façon d’exprimer une angoisse ou un sentiment d’impuissance face à la succession des informations plus ou moins catastrophiques que diffusent à flux continu les médias. C’est une interrogation légitime - corroborée de plus en plus par les scientifiques ou les analystes de risques. Pour la biodiversité et l’évolution du vivant ce sont les biologistes eux-mêmes qui parlent d’un effondrement déjà réalisé et qui va s’accélérer - avec, par exemple, une population de vertébrés qui a déjà baissé de 60% depuis 1970, une baisse de plus du tiers en moins de 2O ans du nombre d’espèces communes d’oiseaux dans les campagnes en France et du même ordre en Allemagne pour les insectes, ou encore la perspective d’extinction de plus d’un million d’espèces dans le monde … En matière de climat chaque année qui passe conduit à réajuster à la hausse les estimations des impacts possibles liés à l’accélération constatée du changement climatique depuis quelques années. Plusieurs articles publiés en 2018 -2019 par l’Académie des sciences américaine et le « Stockholm resilience Centre » montrent à la fois que le seuil à partir duquel le climat pourrait basculer vers un « attracteur » de très hautes températures – avec des effets incalculables – s’est considérablement abaissé (autour de deux degrés ) et que plusieurs des « points de basculement locaux » sont déjà dépassés ( par exemple pour la fonte de la calotte Arctique) avec des effets d’accélération sur les autres ( El Nino, Gulf Stream ..) [6] . En conséquence de ces deux crises – celle du climat et celle du vivant - c’est toutes les ressources communes de la planète qui sont menacées – et, avec elles la grande majorité des activités humaines. Des craintes s’expriment également à plus court terme en matière économique. Même si elle reste controversée l’hypothèse d’une nouvelle crise économique – liée aux dérèglements financiers et à un niveau d’endettement public et privé très supérieur à celui qui existait en 2008 - a repris de la vigueur dès 2019 et plus encore après la crise du COVID. Du coté social et géopolitique, le constat d’une instabilité croissante s’est trouvé, lui aussi, fortement confirmé (avant même la guerre en Ukraine) [7] - avec le sentiment d’une incapacité des institutions à maitriser les tensions qui se développent. Selon l’OCDE 1, 8 milliards de personnes (un quart de la population mondiale) vivent déjà dans des états considérés comme « fragiles » (autrefois « faillis ») et ce nombre devrait passer à 2, 3 en 2030 et 3,3 en 2050 [8] - tandis qu’à l’intérieur des pays certains territoires s’affaissent. A plus long terme enfin la question de l’épuisement des ressources non renouvelables et notamment de l’énergie pourrait à nouveau se reposer de manière globale et majeure – avec, entre temps, de fortes instabilités locales et l’impact de pénuries partielles. Naturellement toutes ces menaces sont de nature diverse. Elles restent aussi marquées par de fortes incertitudes. Mais leur multiplication rend l’hypothèse d’effondrements (au pluriel et à un terme non défini) non impossibles - d’autant que de nombreuses connexions existent entre elles - comme on a pu, par exemple, le constater en Syrie. La cartographie des risques globaux établie par le Word Economic Forum, montre bien, en effet, comment tous ces risques sont liés et à quel point ceux concernant l’environnement occupent désormais une place centrale dans ce système [9] . Il est significatif, par exemple, que le FMI recommande désormais d’intégrer les risques climatiques dans les stress tests évaluant la stabilité des banques aux chocs externes. Outre les fluctuations du prix du pétrole, du gaz ou des céréales, qui restent toujours des sources majeures de crise, ces risques écologiques devraient donc être appelés à jouer un rôle de plus en plus déterminant dans l’équilibre économique ou social de la planète – ce qui est un élément supplémentaire d’instabilité, compte tenu de notre faible capacité à maitriser la nature [10] .
On peut mettre au crédit des « collapsologues » [11] d’avoir réussi à faire entrer dans le débat public cette perspective de risque majeur - et c’est, en soi, un apport positif. Affirmer cependant que la science (en l’occurrence la collapsologie) permet aujourd’hui de prédire qu’un effondrement de la civilisation thermo - industrielle aura nécessairement lieu dans un avenir très proche repose sur des raccourcis qui sont contestables [12] . Si le concept a permis de créer de toute pièce un domaine d’études scientifique qui a un sens, le rassemblement de matériaux très divers ne permet pas à lui seul de parler de science nouvelle – ou, en tout cas, cette science n’est pas encore constituée. Les causes mises en évidence pour expliquer l’effondrent des sociétés passées (depuis l’empire Romain jusqu’à la civilisation Maya) [13] - telles que les bouleversements, provoqués ou pas, de l’environnement ou l’incapacité politique à faire face à la complexité croissante des systèmes sociaux - restent très diverses et générales et la situation actuelle est si inédite qu’elle rend en partie illusoires les comparaisons historiques. Rien ne dit donc qu’elles puissent suffire à expliquer la situation actuelle et à prévoir le futur. D’autant qu’on ne sait pas précisément de quel système il s’agit et de quel effondrement il est question : effondrement des écosystèmes ? de certains pays ou territoires ? des modes de vie et de production actuels ? de l’économie capitaliste ? de l’ensemble des systèmes politiques et sociaux ? de l’habitabilité de l’homme sur la planète ? On peut aussi reprocher aux « collapsologues », outre un biais de sélection en faveur des hypothèses les plus catastrophistes, d’avoir souvent fait des raccourcis scientifiques critiquables – et de n’avoir pas toujours rendus transparents - mais ils n’en sont pas nécessairement les seuls responsables – les controverses qui ont accompagné les travaux scientifiques qu’ils mettent en avant. L’anticipation d’un effondrement possible dès 2025-2030 doit beaucoup à l’article publié en 2008 - au moment du troisième choc pétrolier – par Graham Turner qui montrait qu’à cette date la réalité confirmait les prévisions faites presque quarante ans avant par le rapport du Club de Rome et que sauf réaction rapide le scénario d’une inversion brutale à partir de 2030 des courbes de croissance de l’économie puis de la population était le plus probable [14] .
Même si la qualité des anticipations faites dans ce rapport est remarquable et s’il a eu l’énorme mérite de mettre en avant la notion de limite, il aurait été conforme à une approche « scientifique » de faire aussi état des controverses qu’il a suscitées [15] (quand bien même certaines critiques se sont révélées non justifiées) – et surtout du fait que l’effondrement prévu pour 2030 est en partie lié à des hypothèses sur les effets de seuil qui mériteraient au moins d’être débattues [16] . Beaucoup de confusion est aussi entretenue sur les temporalités. On oublie de dire que les effondrements précédents ont été lents et progressifs et on entretient le flou sur les horizons. Ainsi la crainte d’avoir à affronter simultanément la crise climatique et le pic pétrolier - qui pouvait se justifier au milieu des années 2000 – s’est-elle trouvée affaiblie par la conjonction d’une augmentation à moyen terme de l’offre (grâce aux hydrocarbures non conventionnels, et l’accès à de l’argent bon marché permettant de financer la hausse des coûts d’extraction ) , et d’une perspective à long terme de forte réduction de la demande – avec la transition énergétique et l’impératif de ne pas exploiter plus de 30% des réserves prouvées exploitables pour respecter les contraintes climatiques [17] . Cela ne diminue pas l’importance structurelle de la relation entre croissance et accès à une énergie fiable et bon marché, mais lie plutôt celle-ci à l’échec ou à la réussite de la transition en cours ou à des facteurs géopolitiques …qu’à des problèmes immédiats de raréfaction. La même remarque s’applique à la question de l’instabilité des systèmes complexes. Certes le monde dans lequel nous vivons – avec ses ramifications multiples, ses interconnexions, l’hyperconcentration des activités, l’irréductibilité des incertitudes liées, notamment, à la nature ... – est vulnérable [18]. Mais Jean-Pierre Dupuy a raison de noter que la complexification accroit autant nos robustesses que nos fragilités - et que des crises locales ne peuvent conduire à des effondrements que si elles touchent des « nœuds majeurs » dans les réseaux de relations et d’interdépendances qui structurent nos sociétés – ce qui n’est pas le plus probable [19] . Des catastrophes locales ou même des effondrements partiels pourront se produire mais si les capacités de résilience et d’adaptation sont suffisamment développées, rien ne permet d’affirmer qu’elles conduiront nécessairement à un effondrement général.
Reste le principal mérite de la collapsologie de nous mettre en alerte – au-delà des messages adressés par les scientifiques - sur la gravité des risques qui sont devant nous et à la fragilité du monde dans lequel nous vivons. Mais en annonçant comme certain l’effondrement prochain la collapsologie délégitime en même temps toutes les raisons qui justifient – au contraire – que l’on fasse tous les efforts pour l’éviter. Laissant aux individus et aux communautés – à l’ombre du catastrophisme resurgi des années 6O [20] - le soin de s’adapter à une possible apocalypse, elle peut aussi paradoxalement s’interpréter comme le choix idéologique du renoncement, d’une « mise en retrait » - comme s’il était plus facile d’accepter « la fin du monde » que de s’engager dans les mesures radicales qu’impose la transition écologique et sociale. C’est sans doute la critique majeure que l’on puisse lui faire.
Anticiper l’effondrement ou en évaluer les risques ne sont pas des préoccupations nouvelles. Depuis l’antiquité cette perspective a resurgi périodiquement comme une des figures possibles ou nécessaire du futur et des chercheurs s’y sont investis bien avant la collapsologie [21] . Ce qui a changé, c’est à la fois le contexte et les formes dans lesquelles ce futur a été historiquement appréhendé …et donc cette hypothèse catastrophique éventuellement annoncée et argumentée. Bernard Cazes, à travers son « Histoire des futurs », et, beaucoup plus récemment, Francis Chateaureynaud, ont en effet bien montré l’évolution et la grande diversité des modes d’appréhension du futur - allant de la divination à la science-fiction, en passant par l’anticipation, la prévision, la prospective, la prophétie, l’urgence, la futurologie, ou la philosophie morale… (voir le tableau 1) [22] .
Tableau 1 :
Les formes de prise sur le futur
(Source : F. Chateaureynaud, tableau réduit et légèrement modifié)
Modalisation | Exemples | Formes de critique | |
Urgence | Le temps manque. Il est soustrait par la force de l’événement | Déclenchement d’un plan de secours. | On ne peut tout traiter en urgence. Réactions émotionnelles. |
Attente | Temps suspendu. Adaptation aux incertitudes du temps |
Panne : attente du retour à la normale, Systèmes d’alarme. |
Perte de temps, attentisme et immobilisme |
Préparation, planification. | Temps investi | Plans, Stratégies de résilience |
Problème de moyens, d’acceptabilité, horizons trop courts. |
Anticipation | Accélération du temps, être en avance sur le processus. | Alerte climatique, ou différents usages du principe de précaution. | Manque de vigilance, surinterprétation de signaux faibles. |
Prévision | Temps calculé et linéarisé avec projection des états du monde. | Modèles de croissance, évolution d’indicateurs, fin du pétrole. | Imprévisibilité, projection naïve du passé, cadrage et réductionnisme . |
Prospective | Temps déplié, non linéaire, ouvert sur une multiplicité de possibles, en partie construit. | Scénarios énergétiques ou de modes de vie, ruptures dans les cycles d’innovation. | Prolifération de scénarios indécidables et accroissement des incertitudes, risque de relativisme. |
Promesse | Génération de délais et de reports vers le futur. | Homme augmenté, zéro carbone en 205O. | Les promesses n’engagent que ceux qui y croient. |
Prophétie | Temps eschatologique créant un pont entre l’instant et l’éternité. Nouveau temps annoncé. | Destruction de la planète, post humanité, fin du monde versus nouveau monde . | Catastrophisme versus prophétie du bonheur, irrationalité, vision religieuse du monde. |
Futurologie, philosophies de l’histoire (prophétie rationalisée) | Temps déterminé Récit rationalisé du futur qui en propose une vision univoque . | Comte, Marx, Hegel, Fukuyama, Homo Sapiens… | Fermeture et univocité du futur, valeurs sous couvert de rationalité. |
Science -fiction | Temps fictionnel, Ouverture des possibles par l’imagination. | 1984, Le meilleur des mondes, Tous à Zanzibar, La route, Les furtifs. | Brouillage des frontières entre le possible et l’impossible. |
Il n’est pas facile de situer la collapsologie dans cette multiplicité car elle empreinte un peu à tous ces registres. Si elle a redonné une « seconde vie » au rapport du Club de Rome, ce n’est pas à proprement parler le résultat d’un exercice de prospective – mais plutôt un récit sur l’avenir mêlant anticipation scientifique, prévision, prophétie et fiction - avec une forte dimension eschatologique.
Ce qui est sûr, c’est qu’il existe beaucoup de différences entre collapsologie et prospective. Pour celle-ci il ne peut pas y avoir de « science du futur » mais seulement une « approche raisonnée » de celui-ci. Comme le disait en 1960 Bertrand de Jouvenel, l’un de ses fondateurs, « La prospective est un « art de composition » : on part de toutes les relations causales jugées pertinentes, mais leur assemblage repose sur un modèle hypothétique qui ne peut être validé scientifiquement. Ce qui importe c’est que cette conjecture soit raisonnée, les informations de base vérifiées, c’est que le bâti soit énoncé, transparent, livré à la critique ». La prospective s’est aussi construite sur une critique du déterminisme et de la prévision, avec l’idée que le futur n’est pas un simple prolongement du passé, qu’il est multiple et en large partie domaine de liberté et de volonté. Son but, enfin, n’est pas seulement de proposer des récits crédibles du futur, mais d’aider à construire des actions acceptables dans le présent. Par rapport à la perspective « catastrophiste » ces spécificités sont à la fois des atouts et des handicaps. L’atout, c’est l’ancrage dans l’histoire, le souci de vérifier les hypothèses, l’approche systémique, l’ouverture à la controverse, et l’orientation vers l’action. Le handicap – mis en évidence dans le tableau 1 par Francis Chateaureynaud, mais aussi par Jean Pierre Dupuy [23] , c’est le risque de relativisme et de surestimation de l’ouverture du futur - « la prolifération de scénarios indécidables laissant une trop grande place à l’incertitude et à la volonté humaine ou politique ». Cette critique n’est pas fausse. Si depuis les années 60 – et les travaux précurseurs de Kenneth Boulding [24] - la prospective a accordé une très large place au thème de l’environnement et si beaucoup d’exercices ont été produits qui comportaient une éventualité « catastrophiste », il est vrai que cette partie de leur message est restée le plus souvent inaudible car elle s’accompagnait presque systématiquement d’alternatives positives qui en ’euphémisaient’ les effets. La seule exception visible fut le rapport du Club de Rome, qui, lui aussi, proposait plusieurs scénarios mais en concluant finalement que tous aboutissaient au même effondrement - à des dates différentes. Cette fois le message fut entendu, tout en étant immédiatement rejeté - car il ne proposait aucune alternative réalisable : c’est tout le dilemme de la prospective souvent écartelée entre sa fonction d’alerte et la nécessité de proposer des solutions qui soient acceptables.
Bien que justifiée, cette critique ne rend cependant pas compte de la diversité des formes de prospective – au point d’ailleurs qu’il est difficile aujourd’hui d’en parler au singulier. Au lieu d’une approche uniformément centrée sur l’ouverture des possibles, celle-ci se caractérise en effet plutôt par une mise en tension permanente entre continuités et discontinuités, recherche de certitudes et attention aux incertitudes (ou « cygnes noirs « ), poids des déterminismes (du présent vers le futur) ou , au contraire , du volontarisme (du futur au présent) - et donc finalement par le souci de trouver le meilleur compromis possible entre le probable , le possible , le souhaitable ( ou inacceptable ) et le réalisable . C’est ce qui explique qu’il en existe d’ailleurs plusieurs approches très différentes selon le poids donné à ces quatre préoccupations - comme le résume le tableau 2.
Tableau 2 :
Quatre formes de prospective
Relation au futur Rapport à l’incertitude | Prospective exploratoire (du présent vers le futur) | Prospective normative (du futur au présent) |
Recherche de certitudes | Prospective prévisionnelle LE PROBABLE |
Visions du futur LES SOUHAITABLES OU INACCEPTABLES |
Importance et mise en évidence des incertitudes | Prospective des discontinuités LES POSSIBLES OU NON IMPOSSIBLES |
Prospective stratégique LES REALISABLES OU EVITABLES EN CONTEXTE INCERTAIN |
En combinant ces différentes approches il est cependant possible de garder les avantages que procure la pluralité des scénarios tout en réduisant fortement l’indétermination qui en résulte. On part du cône ouvert des possibles (« forecasting ») pour ensuite progressivement le refermer - d’abord en se fixant un objectif souhaitable – ou un risque inacceptable – puis en imaginant les trajectoires qui permettent de l’atteindre ou l’éviter dans chaque hypothèse (backcasting) et enfin en éliminant celles qui sont irréalisables. La démarche est finalement assez proche du « bouclage » entre présent et futur que propose Jean Pierre Dupuy dans son ouvrage sur le « Catastrophisme éclairé » [25] .
Malheureusement cela suppose beaucoup de conditions et de temps d’analyse et ce bouclage est rarement fait pour des problèmes complexes. Il y a cependant, en dehors du rapport du Club de Rome, une exception remarquable qui est le programme mené par le « Global Scenario Group » et le « Tellus Institute » à la fin des années 90 - sans doute l’exercice de prospective le plus ambitieux jamais mené à l’échelle mondiale et l’éclairage le plus utile que puisse offrir actuellement celle-ci sur le thème de l’effondrement [26] . Ce qui en fait le caractère exceptionnel c’est qu’il est à la fois global et multi échelle ; qu’il prend en compte toutes les dimensions possibles (démographiques , économiques , sociales , technologiques , politiques et écologiques ) et ceci de manière réellement systémique ; qu’il est à la fois qualitatif et quantitatif ; qu’il dessine plusieurs visons conflictuelles de l’avenir ; mais aussi et surtout qu’il s’intéresse aux dynamiques, aux trajectoires, aux bifurcations prévisibles sur toute la période allant de 1990 à 2100. Il ne s’agit pas tant de dessiner ce que sera le monde de demain - que de mettre en évidence les points de bifurcation, de basculement, pouvant conduire à telle ou telle trajectoire - liés à celles de « forces motrices » ou « d’attracteurs ». Les projections quantitatives se doublent ainsi d’une analyse en termes de sociologie des acteurs ou de géopolitique qui mettent l’accent sur les rapports de pouvoir, les régulations, les conflits d’intérêt et de valeurs, les questions d’équité, la perception des risques. Six trajectoires d’évolution possibles sont anticipées (voir le tableau 3) dont une menant en effet à un effondrement. Elle résulte de l’incapacité à réguler les tensions liées à la fois à l’accroissement des inégalités, à l’accélération des crises écologiques et des conflits sur les ressources, aux désordres ou défaillances économiques et financiers, et à la délégitimation croissante des institutions politiques. Elle est surtout la conséquence de l’échec des autres scénarios : lenteur et insuffisance du scénario réformiste (celui de l’accord de Paris) – comparé à « monter un escalateur à l’envers », impossibilité de faire accepter des ruptures dans les modèles de développement (« le nouveau paradigme écologique »), mais aussi échec du repli protectionniste des pays ou groupes les plus riches dans des enclaves protégées (« Le monde forteresse »). Pour y faire face les auteurs mettent en avant la nécessité d’une « Grande transition » - dont ils vont à la fois préciser et évaluer le contenu et les trajectoires dans leurs travaux suivants [27] . Celle-ci s’est en effet amorcée depuis la publication du rapport, mais les changements climatiques et les transformations du monde se sont en même temps considérablement accélérés. 25 ans après les marges de manœuvre se sont réduites, nous savons qu’il n’y a plus d’autre alternative durable et que le chemin à suivre sera difficile.
Mais il reste ouvert.
Tableau 3 :
Six perspectives mondiales pour 2050 - 2100
(Source : GLOBAL SCENARIO GROUP )
Familles de scenarios | Variante 1 | Variante 2 |
Mondes conventionnels : Les valeurs, les modes de production et de consommation, la démographie, les rapports de puissance sont dans le prolongement les tendances passées et la mondialisation s’accélère. |
Scénario de référence. Le développement est déterminé par les logiques de marché, qui s’étendent. Les valeurs dominantes sont celles du consumérisme, de l’individualisme et du profit à court terme. Internet et le numérique réduisent la diversité culturelle. |
Réformisme politique. Face aux risques liés au scénario précédent, la communauté internationale envisage une réponse politique collective. Cette réponse porte, notamment, sur l’environnement et la pauvreté, combattus par des moyens technologiques. |
Barbarisation. Les forces de rappel qui devraient permettre aux mondes conventionnels de perdurer ne fonctionnent pas ou sont insuffisantes. Les contradictions sont exacerbées, conduisant à une dérégulation du système mondial et à des évolutions chaotiques. |
L’effondrement. Les inégalités et les crises écologiques deviennent telles qu’elles conduisent à des effondrements économiques et sociaux. Les gouvernements sont impuissants à contrer ces tendances. Les conflits entre Etats et des guerres civiles se multiplient. |
Le monde Forteresse. Pour échapper au risque d’effondrement du scénario précédent et aux crises qui lui sont liées, certaines grandes puissances ou groupes sociaux instaurent des « ordres locaux » fondés sur la domination militaire et policière. La ségrégation devient la règle. |
Grandes transitions. Ces scénarios veulent être des « utopies réalistes » indispensables pour envisager le passage à une planète durable. Ils supposent une prise de conscience des limites et des risques liés aux scénarios précédents - et une transformation en profondeur des systèmes de valeur et de décision. |
L’Eco communautarisme. Les insatisfactions par rapport au fonctionnement démocratique et la montée des valeurs immatérielles conduisent à l’émergence de sociétés et de communautés autonomes isolées qui s’organisent pour faire face aux enjeux existants. Les pratiques collaboratives et de partage se développent. |
Le nouveau paradigme de durabilité. L’évolution des valeurs et la prise de conscience des risques conduisent à privilégier la prise en compte des biens communs et la sécurité des plus vulnérables aux dépends de la consommation et de la course à la taille. Des transitions concrétisent un nouveau paradigme de développement coordonné au niveau mondial. |
Au vu des travaux du CSG il serait irresponsable d’ignorer totalement la possibilité qu’une conjonction d’effets en chaine conduise - à des effondrements partiels au cours du siècle actuel. Les travaux publiés en 2018 par la Société Française de Prospective sur « La Grande Transition » - commencée au milieu du siècle dernier - ont également montré que nous sommes entrés depuis le début du siècle dans une nouvelle phase de celle-ci qui sera marquée par des bouleversements majeurs, une incertitude radicale, et la récurrence possible de catastrophes locales – sans que soit déjà déterminé ce que sera le monde d’ici 3O ou 8O ans [28] . La succession depuis cette date de d’extrêmes climatiques, de la crise du Covid puis la guerre en Ukraine ne font qu’illustrer encore plus cette instabilité structurelle. Face à ces perspectives il va être vital de développer partout où cela est possible les capacités d’adaptation, de résilience ou de gestion de crise et les politiques de réduction des vulnérabilités majeures ou de protection des territoires, activités ou populations les plus fragiles [29] . Mais cela ne suffira pas. Ni ces comportements de prudence ni même l’expérience répétée de catastrophes locales – de Fukushima aux méga-feux en Australie - ne permettront à eux seuls de nous prémunir de ruptures plus systémiques. Elles peuvent même en accroitre l’occurrence. Il faudra aussi, dans le prolongement des travaux de l’OCDE ou du CSG, évaluer de manière beaucoup plus détaillée les effets en cascade, les trajectoires et scénarios qui pourraient éventuellement conduire à des effondrements partiels ou plus larges – avec une attention particulière à l’inégalité des situations et aux vulnérabilités les plus graves. Mais surtout s’engager beaucoup plus qu’aujourd’hui dans deux révolutions culturelles majeures. D’abord construire la culture adulte du risque que nous n’avons toujours pas [30] . Et ensuite transformer en profondeur notre vision du temps pour faire de l’irréversibilité, du délai, de l’entropie, de la limite et même de l’éventualité d’une possible catastrophe – c’est-à-dire de l’hypothèse d’un temps fermé et non ouvert - la source d’un débat démocratique renouvelé sur des actions alternatives comme le proposent, à la suite de Gunther Anders et Jean Pierre Dupuy, de nombreux chercheurs comme Luc Semal, Bruno Villalba, Alice Canabate , Bernard Stiegler, Dominique Bourg ou encore Bertrand Guillaume [31] ….
Mais le risque essentiel aujourd’hui est moins celui d’un effondrement que celui d’une paralysie ou d’une panique entretenue par la collapsologie - qui ralentiraient encore plus les dynamiques engagées dans le sens de la transition écologique. Là aussi, dans ce domaine, chaque jour compte – et le catastrophisme proposé comme unique perspective – tout en ouvrant le faux espoir de solutions individuelles – ne pourra que renforcer à terme la fragilité non seulement du système « thermo industriel » qui doit être transformé, mais aussi des écosystèmes naturels, de l’ensemble des systèmes sociaux et politiques, et des populations les plus pauvres de la planète - qui seront les premières à être affectés. Entre la conscience du risque, la volonté d’y faire face ou de tirer les expériences des catastrophes, et le fatalisme de l’apocalypse il y a un gouffre - et dans cette différence se logent à la fois les réalités de demain et notre capacité à trouver des solutions de rupture à la crise climatique [32] comme à surmonter la « panne de futurs » que nous traversons – liée à la colonisation de celui-ci par le catastrophisme et par le déterminisme ou solutionisme technologique. C’est à ces deux dernières taches que nous devrions consacrer toute notre énergie – et la prospective, comme le débat démocratique à toute les échelles, devrait prioritairement s’y investir.
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Notes
(pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note)[1] Source : Fondation Jean Jaurès, enquête internationale sur la collapsologie, Novembre 2019. Les quatre thèmes sont ceux cités par les personnes consultées.
[2] Dans l’enquête internationale de 2019 citée en note 1, la crainte d’un effondrement était partagée par 65% des français, contre 71% pour les Italiens, 50% pour les américains et anglais et 39% pour les allemands.
[3] Conférence qui a donné lieu à la publication de plusieurs rapports très argumentés dont I. Linkov, B. Trump, W. Hynnes, Face aux menaces systémiques, des stratégies et des approches fondées sur la résilience.
[4] Notamment l’International Risk Governance Center, AXA Eurasia et la World Economic Forum.
[5] Voir sur toutes ces différents approches les ouvrages de Bruno Villalba (Les collapsologues et leurs ennemis, 2021), Luc Semal (Face à l’effondrement, militer l’ombre des catastrophes, 2019), Alice Canabate (L’écologie et la narration du pire, 2021), Raphael et Catherine Larrère (Le pire n’est pas certain, 2021).
[6] Sources, W. Steffen, J. Roström et alli, Trajectories of the earth system in the Anthropocene, PNAS, Vol 115, 2018 ; T.M Lenton, J. Rockström et alli, Climate tipping points, too risky to bet against, Nature, vol 575, 2019 .
[7] Rappelons que cet article est une version actualisée d’un texte écrit en 2019.
La pandémie et la guerre en Ukraine n’ont fait que renforcer les craintes déjà exprimées à cette époque …
[8] Source : States of fragility in 2018, OCDE, 2019. 3, 3 milliards en 2050 ce sera 35% de la population mondiale.
Voir aussi la Stratégie de l’AFD 2017-2021 sur la vulnérabilité aux crises et la résilience internationale.
[9] Voir les Global Risks Report publiés chaque année de 2015 à 2020 par le ’World Economic Forum’ en partenariat avec ’Zurich insurance group’ et ’Marshall McClennan’.
[10] Voir J. Theys, Prospective de l’environnement : la nature est-elle gouvernable ?, Revue Espaces et Sociétés, N°74-75, 1994.
[11] On regroupera sous ce terme l’ensemble des personnes, des groupes ou des institutions (comme l’Institut Momentum) qui défendent publiquement qu’un effondrement prochain est très probable ou certain. Dans cet article on se référera essentiellement à l’ouvrage déjà cité de Pablo Servigne et Raphaël Stevens, Comment tout peut s’effondrer ? Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes, Le Seuil, 2015.
[12] Voir les critiques de Raphael et Catherine Larrére et de Jean- Pierre Dupuy, opus cités notes 5 et 19.
[13] Sources : Jared Diamond, Effondrement, Gallimard, 2005 ; KW Butzer, Collapse, environment and society, PNAS, vol 09, N°10 2012 ; Joseph Tainter, The collapse of complex societies, Cambridge University Press, 1988.
[14] Graham Turner, A comparaison of the Limits to growth with 30 years of reality, Global Environnemental Change, 2018.
[15] Voir, en particulier, l’ouvrage publié par l’Université du Sussex (H. Cole, C. Freeman, M. Jahoda, K. Pavitt) en 1974 : L’anti Malthus, une critique de Halte à la croissance, Le seuil, 1974.
[16] Le modèle est, par exemple très sensible, à un seuil d’exploitation de 50% des ressources non renouvelables au-delà duquel la part du capital consacré à l’extraction de ces ressources augmente très rapidement – entrainant une baisse de ce qui est disponible pour le capital industriel, et donc de la croissance.
[17] C’est la condition fixée à la fois par le GIEC et l’Agence International de l’énergie pour respecter les 2 degrés.
[18] Voir J.L. Fabiani et J. Theys (dir), La société vulnérable, Presses de l’Ecole Normale Supérieure, 1987.
[19] Jean-Pierre Dupuy, Simplismes de l’écologie catastrophiste, AOC, Octobre 2010
[20] Référence au livre de Luc Semal, Face à l’effondrement, militer à l’ombre des catastrophes, PUF, 2019.
[21] Voir, en particulier l’ouvrage de P. Timmerman publié en 1981, Vulnerability, Résilience and the collapse of society, Monographie N°1, Institute for Environmental Studies Université de Toronto .
[22] Bernard Cazes, Histoire des futurs, les figures de l’avenir de Saint Augustin au XXI éme siècle, Seghers, 1986 et Francis Chateaureynaud, Regards analytiques sur l’activité visionnaire (les prises sur le futur), in D. Bourg, P.B. Joly ; A. Kaufmann, Du risque à la menace, penser la catastrophe, PUF, 2013.
[23] J.P. Dupuy, Le futur bifurque-t-il ? Vers une nouvelle science du futur, in M. Grossetti, M. Bessin et C. Bidard, Les sciences sociales face aux ruptures et à l’événement, La Découverte, Recherche 2013.
[24] Kenneth Boulding, à travers la publication en 1964 de « The meaning of the 20th century, the Great Transition », précurseur du rapport Meadows, a inspiré ce que B. Cazes appelle la « prospective du tournant », inquiète sur l’avenir de la planète. Voir J. Theys, aux sources de la notion de Grande Transition, in C. Afriat et J. Theys, La grande Transition de l’humanité, Editions FYP, 2018 …et l’ouvrage de B. Cazes.
[25] Comme dans cet ouvrage, le passé et le futur se déterminent mutuellement dans une boucle ayant un point fixe dans le futur. Pour J.P. Dupuy, qui se situe dans le temps du projet, la trace du futur sur le présent est double : c’est à la fois l’inéluctabilité de la catastrophe et son indétermination ou indécidabilité. Pour la prospective stratégique, on est à la fois dans le temps du projet et celui de l’histoire, avec un objectif à atteindre à long terme et des trajectoires possibles qui se resserrent.
[26] G. Galllopin, Al. Hammond, P. Raskin, R. Stewart, Global Scenario Group : « Branch points, global scenarios and human choices », Stockholm Environment Institute, 1997.
[27] Le Global scenario group a continué ses travaux à l’intérieur du Tellus Institute et de la « Great Transition initiative » - qui publia de nombreux rapports dont, en 2016, « Journey to Earthland » de Paul Raskin.
[28] Voir « La Grande Transition de l’humanité », opus cité note 24 et notamment l’article de Fabienne Goux Baudiment qui fait référence au monde VUCA (Volatilité, Incertitude, Complexité, Ambiguïté) et utilise la métaphore du choc violent entre deux plaques tectoniques pour caractériser les décennies à venir.
[29] Voir le rapport de l’OCDE sur la résilience citée en note 2, l’ouvrage récent de Nassim Taleb, « Antigragile », Random House, 2012 et le N° 9 de la revue Acta Europeana Systemica sur la transition vers la résilience (2019).
[30] C’était déjà la conclusion de l’ouvrage « La société vulnérable » publié en 1987.
[31] Source : Bertrand Guillaume et Victor Petit : Fermeture des futurs, ouverture de la démocratie, in Y.C. ; Zarka, La démocratie face aux enjeux environnementaux, Editions Mimésis, 2017 ; Gunther Anders, Le temps de la fin (1960), éditions de l’Herne, 2007et L. Semal et B. Villalba, L’obsolescence de la durée (2013).
[32] Symétriquement aux « points de basculement » susceptibles d’entrainer des catastrophes, une vingtaine de chercheurs viennent de publier en janvier 202O dans les proceedings de l’académie des sciences américaine un article sur ceux qui pourraient jouer un rôle décisif dans la stabilisation du climat. Source Ilona Otto et allii, Social tipping dynamics for stabilizing Earth’s climate by 2050, PNAS, Jan. 2020.