Résumé
Nantes est l’une des villes les plus attractives de France. Elle fait partie des quelques villes qui dès le milieu
des années 90 se sont retrouvées dans le concept de développement durable, rimant avec croissance équilibrée et qualitative. Par souci de cohésion sociale, d’économie d’espace et de ressources, elle vise à concilier
lutte contre l’étalement urbain et qualité de vie pour tous. Aussi bien la communauté urbaine que la ville
se sont dotées d’ambitieux agenda 21 locaux. Néanmoins les obstacles restent nombreux et les défis à relever énormes.
Entre déclarations et réalisations, la route peut être longue comme en témoignent quelques exemples thématiques. Mais le territoire dispose d’atouts pour poursuivre sur sa lancée.
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La nouvelle classification de cet article est :
• 3.2-Agendas 21 locaux et pratiques territoriales de développement durable
Auteur·e
Laurent Comeliau, attaché territorial, est en charge de la mission développement durable de la ville de Nantes depuis mai 2004. Economiste et éco-conseiller de formation, après 8 années dans le milieu associatif (animateur de 4D notamment), il a exercé dans l’administration publique centrale au sein du comité préparatoire pour le sommet mondial de Johannesburg (2002) puis de la mission interministérielle de l’effet de serre (plan climat 2004).
- Le milieu des années 1990 comme point de départ
- Nouveau siècle, nouvelles démarches
- Des ambitions aux réalisations
- Limiter les émissions de gaz à effet de serre
- Densifier la ville et vivre ensemble
- Protéger les espaces verts et naturels et leurs biodiversités
- Être une collectivité exemplaire avec une commande publique responsable
- Favoriser la diversité culturelle, l’intégration, être ouvert sur le monde
- Rechercher une participation qualitative et quantitative
- La poursuite annoncée d’une croissance qualitative et équilibrée ?
Nantes, 6e ville de France présente un des taux de croissance démographique le plus fort du pays avec près de 10 % au cours de la dernière décennie. Cette augmentation devrait se poursuivre au rythme de 7 à 8 % d’ici 2010 au moins.
La qualité de vie et l’environnement privilégié y sont des atouts majeurs : le dynamisme économique et culturel, la qualité des services (transports, éducation, santé), le “bien être” social, les cours d’eau (Loire et son estuaire, Erdre, Sèvre notamment), espaces naturels et jardins, la proximité de la côte atlantique et de Paris (2h en TGV) rendent le territoire très attractif.
La ville centre et ses 280 000 habitants reste le moteur démographique de l’agglomération (580 000 habitants) enregistrant au cours des deux derniers recensements un solde migratoire positif de 8 900 habitants. À titre de comparaison, pendant cette même période la commune de Rennes perdait 5 300 habitants, celle d’Angers 820 alors même que leurs agglomérations respectives ont augmenté. [1]
Dès lors, les équations nantaises en terme de développement durable sont relativement simples à poser : comment concilier qualité de vie, croissance démographique, préservation des espaces et des ressources et bien être pour le plus grand nombre ? Leur résolution l’est, bien entendu, moins.
On sait qu’il n’est pas aisé de distinguer la conduite de politiques publiques volontaristes, innovantes et structurantes d’actions réellement réfléchies en terme de développement durable. Les « Monsieur Jourdain » du développement durable sont nombreux à se déclarer, parmi lesquels beaucoup se contentent en fait du développement durable d’un jour… Il serait ainsi aisé pour Nantes de remonter à la fin des années 70 avec l’audacieuse politique des déplacements (réintroduction du tramway, arrêt des projets de pénétrantes routières) pour s’en prévaloir.
Mais, si l’on admet que l’on commence à faire du développement durable uniquement quand l’on en prend conscience, la notion de responsabilité étant un point essentiel de la mise en œuvre du développement durable [2] , son histoire à Nantes débute alors au milieu des années 1990. C’est plutôt par le biais de sa richesse environnementale que la ville s’est alors saisie pleinement du développement durable. En 1996, active au sommet mondial des villes Habitat II (Istanbul) et signataire de la Charte européenne des Villes durable, elle lance une première démarche d’Agenda 21. Jean-Claude Demaure, adjoint à l’environnement, en est l’instigateur. « Agenda 21 nantais : l’écologie urbaine du 21e siècle » titre ainsi, fin 1997, la lettre d’information du personnel de la ville qui conclut que le plan d’actions doit “permettre aux générations actuelles et futures d’admirer encore et toujours… le héron cendré de l’Erdre !”.
Pour autant, aux côté de thèmes naturalistes, des sujets comme l’éco-citoyenneté, l’efficacité énergétique ou encore le bruit figurent dans ce premier plan d’action.
La fin des années 90 voit se mettre en place le Conseil consultatif nantais de l’environnement, enceinte de concertation des acteurs environnementaux du territoire. Le centre de ressource Ecopole Maison de l’environnement à statut associatif est alors également créé pour sensibiliser et informer les nantais.
Au sein des services municipaux, un réseau de correspondants développement durable se constitue pour insuffler la dynamique pilotée par la Mission Environnement Risques de la ville.
À noter que d’autres communes de l’agglomération, tout particulièrement celles de Rezé et Bouguenais, se sont aussi illustrées en précurseurs du développement durable dès le milieu des années 1990.
L’organisation de la politique municipale de développement durable Depuis 2004, la ville a contractualisé par écrit avec les services et les élus l’ensemble des politiques publiques qu’elle mène. Dix-huit ont un caractère thématique (culture, éducation, action sociale, sport, espaces verts, …) et trois ont un caractère général transversal : démocratie locale, développement urbain et développement durable. Elles sont toutes formalisées sous forme de plans d’action. La mission développement durable en charge de l’animation de cette politique au sein des 8 directions municipales est rattachée au directeur général de l’urbanisme, le suivi trimestriel du plan d’action étant assuré par le directeur général des services.
Pour en savoir plus : http://www.nantes.fr |
En 2001, un nouveau mandat municipal et surtout la création de la Communauté urbaine, Nantes Métropole, met un terme à cette première expérience. Elle a été riche d’enseignements : nombre de thèmes méritent d’être traités à une échelle intercommunale ; les enjeux environnementaux, voire naturalistes sont restés trop prépondérants ; les échanges ont été très stimulants mais n’ont pas suffisamment donné lieu à des actions concrètes ; de ce fait le Conseil nantais de l’environnement à généré quelques frustrations. [3]
Mais ces initiatives ont l’immense mérite d’avoir ancré le développement durable dans les consciences (et dans certaines pratiques tout de même), ce qui va permettre de bâtir les stratégies suivantes. Le “pied est dans la porte” en quelque sorte.
Là encore, l’occurrence d’une conférence internationale est déterminante : les élus nantais reviennent du sommet mondial du développement durable (septembre 2002, Johannesbourg) convaincus du bien fondé de renforcer le développement durable du territoire.
Une double démarche est alors lancée : un agenda 21 à l’échelle communautaire et un à l’échelle municipale. Ils sont tous deux coordonnés politiquement par Ronan Dantec, adjoint nantais à l’environnement et au développement durable et par ailleurs Vice-Président de Nantes Métropole en charge de ces mêmes thèmes.
La dynamique d’agglomération privilégie les grandes politiques structurantes de réseaux comme les transports, l’énergie, les déchets, l’eau et autres champs de compétences transférés tels l’économie et la recherche ou encore les grands aménagements communautaires. Les 21 chantiers de l’Agenda 21 métropolitain sont engagés depuis début 2006. Ils vont du Plan Climat territorial à l’animation du réseau d’agglomération d’Agendas 21 locaux (16 des 24 communes s’étant aujourd’hui engagées dans un Agenda 21, point fort de la dynamique nantaise) en passant par la gestion partenariale des zones humides ou encore l’industrie locale durable [4]. On soulignera que nombre de ces actions dépassent les compétences formelles de Nantes Métropole (plan climat, place des seniors, conciliation des temps, etc.).
A l’échelle communale, outre les actions de compétences municipales (actions patrimoniales sur les équipements publics, achats responsables, urbanisme, actions éducatives, espaces verts urbains, intégration, diversité culturelle, etc.), c’est la proximité avec les habitants qui est privilégiée.
Cela se traduit dans la politique publique de développement durable adoptée par la ville en juillet 2005 avec un ensemble d’initiatives très concrètes visant notamment à modifier le comportement de chacun. Les démarches de concertation, d’information et de sensibilisation, telle que la vingtaine d’ateliers publics du développement durable qui se sont déroulés au cours de l’année 2006, participent de cette recherche de proximité et de mobilisation du plus grand nombre.
Les grandes orientations que sont la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la lutte contre l’étalement urbain et la protection des espaces naturels, le vivre ensemble et l’évolution des modes de vie font résonances dans la plupart des communes de l’agglomération.
Les démarches d’Agenda 21 permettent de mettre en cohérence ces objectifs dans les différentes politiques publiques, de donner du sens aux actions qui en découlent. Elles sont tout autant un outil de mobilisation en interne qu’un outil de dialogue avec la population.
L’étalement urbain de l’agglomération nantaise
(En jaune, zones agglomérées)
Elles s’appuient largement sur l’ensemble des outils de programmation, les nourrissant à leur tour à chaque révision : schémas de cohérence territoriale, plan des déplacements urbains, plan local de l’habitat, plans locaux d’urbanisme, schéma directeur…
L’enjeu pour la ville centre qui compte la moitié de la population de la métropole, est majeur. L’enchevêtrement des compétences entre les deux collectivités nécessite une fine articulation entre élus et services respectifs.
Mais entre les diagnostics, les déclarations d’intention et les réalisations effectives, le chemin reste difficile. En voici quelques illustrations thématiques.
Le Plan climat de Nantes Métropole vise une réduction par deux des émissions à horizon 2025. Bâtiments et transports représentent 52 % des gaz à effet de serre anthropiques de l’agglomération. Dans ce dernier secteur, cela signifie poursuivre le rythme actuel de croissance annuelle des transports publics, soit 4 % en 2006, jusqu’à cette échéance.
© Explicit, 2005
Mais malgré ces efforts, la répartition modale évolue peu à l’échelle de l’agglomération. L’objectif ambitieux du Plan des déplacements urbains à horizon 2010 visant à un équilibre modal entre les déplacements automobiles et les autres modes, ne devrait pas être atteint, la part de la voiture étant d’aujourd’hui de 62 %. Mais le défi est encore plus grand en matière de bâtiments, notamment existants. Plus des deux tiers des habitations datent d’avant la première réglementation thermique du milieu des années 1970. Sans efforts massifs locaux, nationaux et européens, publics et privés, en matière d’investissements, de réglementation et de procédés, Nantes, pas plus que les autres agglomérations ou les pays, ne rempliront les objectifs de Kyoto et post Kyoto.
Il s’agit de remplir les objectifs sociaux du Plan local de l’habitat qui vise à construire 3 900 logements par an dans l’agglomération dont 1 600 à Nantes, en maintenant la mixité sociale au dessus du niveau déjà existant de 23 % de logements locatifs sociaux, tout en visant de plus fortes performances énergétiques et environnementales des bâtiments et aménagements. Ceci doit contribuer à retenir les ménages modestes dans la ville centre qui la fuient en raison du coût du foncier pour s’installer en troisième couronne (30 à 40 km de Nantes). Densifier Nantes, c’est aussi renforcer le vivre ensemble, en tenant compte du vieillissement de la population, en faisant vivre des personnes âgées aisées avec des jeunes souvent en difficulté financière. C’est conserver une ville agréable dans son ensemble. Certains quartiers nantais ont ainsi l’ambition de devenir des “éco-quartiers” (Ile de Nantes, Bottière Chênaie, Saint Joseph de Porterie, etc.) dans toutes les dimensions du terme (écologique, social, économique, culturel). Cette voie est séduisante mais à condition que l’ensemble de la ville en bénéficie à terme. Elle est indissociable de la recherche de paliers qualitatifs globaux qui se déclinent à l’ensemble urbain, ce que reflète le Plan local d’urbanisme. Densifier, c’est enfin soutenir le développement du petit commerce de proximité et poursuivre l’objectif de faire venir les grandes enseignes du commerce en centre ville ; en effet Nantes est historiquement l’une des villes de France présentant le plus fort taux de grandes surfaces par habitant, essentiellement situées en périphérie. La dynamisation du centre ville, notamment ces dernières années, devrait permettre de rectifier petit à petit cette tendance.
L’eau et les espaces naturels sont constitutifs de l’agglomération. La ville s’est fixée comme objectifs entre 2004 et 2010 de maintenir constant le taux d’espaces verts publics par habitant (37m2/h) malgré la densification de la ville et de créer 1000 parcelles de jardins familiaux (on en est à 850 en 2007), lieu de cohésion sociale. Cela revient à offrir à chaque nantais un espace vert à moins de 500 m de chez lui. En concordance avec le plan de réduction des consommations de pesticides adopté récemment par Nantes Métropole, la ville-centre a réduit de moitié depuis 2004 l’emploi de phytosanitaires. Toutefois aller plus loin passe par l’acceptation sociale de voir des “herbes folles” pousser en ville, par l’acceptation des jardiniers de travailler autrement, par le choix d’espèces alternatives également. La gestion des espaces classés Natura 2000, notamment les rives de Loire et la Petite Amazonie, en centre ville de Nantes, la reconquête de la qualité de l’eau des rivières, la préservation des 9 500 hectares de zones humides dans l’agglomération avec les différents partenaires (associations, chambres d’agriculture,…) ou encore la création de près de 1 500 hectares de forêts urbaines dans les 20 ans à venir, sont autant d’objectifs communautaires forts qu’il faudra faire rimer avec activités économiques et pressions foncières.
La municipalité s’est lancée dans une démarche globale et ambitieuse en la matière depuis 2004 : commerce équitable, éco-produits, achats éthiques et insertion. Cependant les difficultés sont nombreuses : une offre souvent non structurée et insuffisante, parfois des surcoûts (et donc un besoin de consensus politique pour générer l’arbitrage), les nécessaires changements culturels au sein des services, l’absence de traçabilité pour nombre de produits, des conditionnements et conditions de livraisons inadaptés, etc. Avec la région des Pays de la Loire et la ville d’Angers, Nantes à lancé le Réseau Grand Ouest commande publique et développement durable, réunissant aujourd’hui une quarantaine de collectivités, pour structurer la demande et peser ainsi sur les fournisseurs.
Les équipements municipaux n’échappent pas à l’objectif d’exemplarité. Des cibles de Haute Qualité Environnementale sont fixées pour tout nouvel équipement et grosse réhabilitation, un suivi énergétique et de consommation d’eau de l’ensemble des bâtiments est conduit, 40 % de la flotte véhicule est considérée comme “propre”, des campagnes sur les écogestes sont régulièrement menées auprès des agents. Mais la marge de progrès reste importante. Ainsi l’investissement dans le remplacement de nouvelles chaudières reste par exemple pour l’instant insuffisant, le suivi de la maîtrise d’œuvre des projets délégués ne permet pas toute la vigilance nécessaire, les véhicules dits propres – quand ils ne sont pas vieillissants – ne sont pas toujours alimentés en modes propres (véhicules GPL approvisionnés en essence), les bureaux restant allumés une fois vide sont encore bien nombreux… Toutefois, ces diagnostics étant désormais partagés, les perspectives de progrès commencent à se dessiner.
Tags apparus il y a quelques temps le long d’une ligne de tramway de Nantes.
“La culture coûte cher ? essayez l’ignorance” peut-on voir écrit sur l’un des murs longeant la ligne 1 du tramway nantais. La ville consacre 15 % de son budget à la culture. Elle fait partie intégrante des projets urbains et contribue fortement au développement de la ville depuis près de 20 ans. Toutefois la question est souvent posée : quelle culture et pour qui ? De plus en plus de voix s’expriment pour que la ville soutienne davantage le développement d’une culture de proximité, “populaire” et diversifiée via les associations de quartiers, les petites troupes et compagnies, sans miser seulement sur des grands événements contribuant au rayonnement de la ville. Au croisement de la politique culturelle et d’intégration, la place des cultures étrangères, au quotidien, est aussi questionnée. Nantes compte aujourd’hui peu d’immigrés (moins de 5 %). Elle développe cependant une politique active d’intégration, notamment parce qu’elle devrait connaître dans les années à venir une croissance assez importante d’étrangers [5].
Des échanges entre jeunes des quartiers avec Rufisque au Sénégal, en matière d’économie sociale et solidaire avec Recife au Brésil, sur la lutte contre le changement climatique avec Seattle aux États-Unis, sur la préservation des espaces naturels avec Cochabamba en Bolivie, ou de parcs et jardins avec Suncheon en Corée ; cet aperçu des coopérations internationales de la ville témoigne d’une diversité de relations potentiellement riches mais qui globalement, à part quelques rares exemples, souffre d’ancrages concrets, novateurs et suivis dans le domaine du développement durable.
Nantes s’illustre par la multitude des formes de concertation proposées aux habitants : conseils consultatifs de quartier dans chacun des 11 quartiers, conseil nantais pour la citoyenneté des étrangers, conseil nantais de la jeunesse, carrefours des citoyens, commissions extra-municipales, ateliers du développement durable et expéditions urbaines pour les projets urbains dans le cadre de l’Agenda 21 municipal, conseil de développement à l’échelle de l’agglomération, fortement mobilisé pour l’élaboration de l’Agenda 21 communautaire, etc.
Elle n’a cessé de chercher à faire évoluer sa politique de concertation. Après 10 années d’aller-retour constant entre l’approche territoriale par quartier et l’approche thématique par compétences municipales, elle s’interroge sur les manières de rendre le dialogue plus effectif et constructif.
Les ateliers nantais du développement durable Dans le cadre de l’Agenda 21 municipal, entre novembre 2005 et janvier 2007, 16 ateliers se sont déroulés autour de thèmes pré-définis collectivement avec les associations d’environnement, de consommateurs, de solidarité internationale ou encore celles agissant sur les questions d’interculturalité. Les 4 thèmes proposés étaient : les éco-gestes et la consommation responsable, les enjeux urbains de demain, la biodiversité en ville et le Vivre ensemble. Près de 300 personnes s’y sont inscrites, chaque séance rassemblant de 20 à 40 personnes environ. Le centre de ressource Ecopole-CPIE Pays de Nantes a contribué à mobilisé les Nantais pour ces ateliers. Ces ateliers ont conduit à la formulation d’une centaine de propositions parmi lesquelles au final une trentaine ont été retenues pour alimenter la politique publique de développement durable. Ces propositions ont été reformulées par les services en une vingtaine d’actions qui font désormais partie du plan d’action développement durable de la ville. Trois des quatre ateliers poursuivront leurs vie sous une forme différente et plus ciblée à compter de l’automne 2007 : un suivi citoyen de projets urbains spécifiques, l’élaboration partenariale d’un site internet de la consommation responsable à Nantes, la mise en place du Conseil nantais de la biodiversité. Pour en savoir plus : www.ecopole.com |
La représentativité des 5 000 personnes qui chaque année participent aux différents dialogues citoyens, le nombre insuffisant de participants (“seulement” 300 par exemple pour les ateliers du développement durable), l’absence en général de jeunes et d’actifs, l’essoufflement dans la durée des consultations, les modalités d’information et le degré de technicité des interventions publiques, l’amène à n’exclure aucunes nouvelles pistes pour l’avenir (tirage au sort d’habitants, conférences de consensus, etc.).
On peut tirer de ces rapides analyses thématiques quelques points de vigilances particuliers pour les années à venir :
- Le risque d’une ville à deux vitesses, “gentrifée” ; même avec des objectifs du plan local d’habitat supérieurs aux exigences de la loi SRU, Nantes n’est pas à l’abri de cela. Ces distorsions s’appliquent bien sûr au niveau de l’agglomération avec les ménages aux revenus moyens ou modestes recherchant désormais des logements à 30 ou 40 km en périphérie ;
- La volonté du territoire d’inventer sa place et son rôle à l’échelle du Grand Ouest et à l’échelle européenne, ouverte sur la façade atlantique, en résonance avec les exigences d’un développement durable. Il ne s’agit pas là d’agir par mimétisme avec d’autres villes françaises de taille similaire mais bien de puiser dans ses propres racines et potentiels pour se développer de façon équilibrée ;
- La capacité des acteurs et politiques locaux à dessiner une nouvelle gouvernance ; cela passe par de nouvelles modalités de coopération, d’engagements, de vision commune partagée, bien souvent en rupture avec celles qui ont prévalues depuis le milieu des années 1990.
Pour autant, au moins quatre éléments acquis permettent de penser que Nantes persévèrera dans la recherche d’un développement équilibré, qualitatif, durable :
- Une volonté politique partagée : la municipalité de Nantes et son Maire, Jean-Marc AYRAULT, également Président de la Communauté d’agglomération Nantes Métropole, ont la volonté de consolider dans les années à venir les orientations prises, sans se priver de tester différents moyens d’y parvenir. Il est probable que Nantes sera confirmée comme l’un des modèles des villes de l’Ouest, qui se présentent en “laboratoires de changement social ouvertes aux idées de l’écologie politique” [6] . Et ce d’autant plus que la conscientisation nationale et internationale sur ces sujets, et en particulier sur le changement climatique, n’a jamais été aussi forte. Si l’action des collectivités territoriales sur ce champs précis ne peut évidemment pas tout, les nantais ne comprendraient pas l’absence de mobilisation et d’exemplarité locale.
- La présence acquise de facteurs qualitatifs forts. Le territoire peut se prévaloir “d’externalités positives”, non comptabilisées par l’approche économique traditionnelle comme les aménités naturelles, les richesses patrimoniales, la notoriété culturelle, voir les conditions climatiques à terme [7] . Elles contribuent largement à son attractivité et sont garantes de son avenir.
- La nature même des relations sociales et de la composition socio-économique qui distingue ce territoire. Ainsi, les travaux de l’économiste Laurent Davezies font ressortir que le développement de la Métropole Nantes-Saint Nazaire, par comparaison aux autres aires métropolitaines, dispose d’atouts forts parmi lesquels un trépied équilibré entre présence industrielle, atouts résidentiels et fortes activités publiques ainsi qu’une maîtrise des phénomènes de pauvreté [8].
- Enfin des choix de politiques publiques de moyen long terme, donc au caractère structurant, fait au cours de ces toutes dernières années : extensions des lignes de tramway complétées il y a quelques mois d’un « busway », développement du réseau de chaleur urbain, ou encore la mise en place audacieuse de Tri Sac qui vise à faire adopter aux nantais de nouveaux gestes éco-citoyens vis-à-vis de leurs déchets.
Pour ne prendre que l’exemple des transports, l’agglomération est ainsi passée de 80 millions de voyages en transports collectifs en 2000 à 110 millions aujourd’hui, soit une augmentation de 40 % pour une population ayant crû dans le même temps de 4 %. Cette augmentation devrait se poursuivre à un rythme de 4 à 5 % par an. Parallèlement plus de 50 000 salariés de l’agglomération bénéficient de plans de mobilité d’entreprises. Ils seront 80 000 en 2010. Voilà des évolutions encourageantes qui doivent contribuer au respect local des engagements de Kyoto.
Notes
(pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note)[1] Nantes, l’avenir d’une ville, Dominique Luneau, Ed. de l’Aube, 2003
[2] Postulat proposé par Hélène Combe, Observatoire de la décision publique, dans sa mission d’accompagnement de l’agenda 21 de Nantes
[3] La démocratie participative, le cas nantais, p77-86, Mathias Le Galic, Ed. L’Harmattan, 2004.
[4] Présentation complète disponible sur www.nantesmetropole.fr
[5] Nantais venus d’ailleurs – Histoire des étrangers à Nantes, des origines à nos jours (Presses Universitaires de Rennes, mars 2007)
[6] La gauche dans l’Ouest : modèle ou réduit ?, Place Publique, revue urbaine Nantes – Saint Nazaire n°4, juillet-août 2007
[7] Nantes dans le classement des villes européennes, Place Publique, revue urbaine Nantes – Saint Nazaire n°2, juillet-août 2007
[8] Les moteurs de développement de la Métropole Saint-Nazaire par Laurent Davezies (Université Paris - Val-de-Marne) dans le cadre de la mission SCOT confiée à la SAMOA, 2007
Bibliographie
Pour en savoir plus
- Dominique Luneau, Nantes, l’avenir d’une ville, Éditions
de l’Aube, 2003
- Nantais venus d’ailleurs, histoire des étrangers de Nantes,
Presses universitaires de Rennes, 2007
- Laurent Comeliau, Nathalie Holec, Jean-Pierre Piéchaud,
Repères pour l’agenda 21 local, 4D, septembre 2001.