Lettre n°02 ----- Automne-Hiver 2016

3 janvier 2017

Campagnes en mutation, campagnes en transition ?

Selon l’INSEE, l’espace à dominante rurale regroupe l’ensemble des petites unités urbaines et communes rurales n’appartenant pas à l’espace à dominante urbaine (pôles urbains, couronnes périurbaines et communes multipolarisées). Cette définition en creux, reflète une certaine subordination de l’espace rural à l’urbain dans les diverses politiques d’aménagement du territoire. Doit-on y voir une des racines des votes populistes enregistrés récemment en Europe ou encore aux Etats-Unis ?

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Ces espaces à dominante rurale représentent pourtant 80 % de la superficie totale et les deux tiers des communes de la France métropolitaine. Derrière l’appartenance au rural se cachent une diversité de situations, de pratiques, de rapport à l’espace. Trois types d’usages principaux [1] : campagne cadre de vie, espace résidentiel ; campagne ressource, productive à la fois de produits agricoles et de biens industriels et campagne nature préservée. Mais aussi campagnes périurbaines, campagnes dynamiques ou campagnes fragiles [2] dans les espaces ruraux « isolés ». Trop sont souvent vus à la lorgnette du mode de vie urbain, ils sont idéalisés de la part de citadins qui souvent confondent nature et ruralité, agriculture et ruralité et qui les rêvent en lieu de vie. Mais force est d’y constater la difficulté d’accès aux services et, en conséquence un manque d’emploi local ainsi qu’un habitat dégradé. Ce bilan donne lieu à de nombreuses initiatives, c’est ce que relatent les fiches « Archipel des régions » des régions Picardie et Auvergne déjà publiées dans l’encyclopédie.

En effet, en rupture avec un processus marqué, jusqu’au milieu des années 70, par des pertes de population et d’activité, on observe maintenant une inversion de la capacité d’attraction des espaces ruraux. Un « désir de campagne » est à la base d’un nouveau souffle que connaissent aujourd’hui ces territoires. Désormais, la ruralité est perçue comme lieu d’innovation. Les écoutes faites par l’UNADEL en témoignent. Les réalisations, les initiatives et les solutions trouvées ainsi que l’enthousiasme des acteurs se révèlent, dans ces espaces ruraux, parmi les démarches de transition les plus actives. Chaque échelle (commune, intercommunalité́, territoire de type Pays ou PNR) dispose d’un potentiel particulier. L’idéal, difficile à̀ atteindre, restant encore leur engagement simultané dans une même démarche de transition coordonnée.

Sur ces territoires les agriculteurs sont de moins en moins nombreux mais ils en sont les « occupants » principaux et leurs pratiques doivent changer si l’on veut réagir face au dérèglement climatique et à l’accroissement des inégalités qui va en résulter. Les zones de culture vont se déplacer. A l’échelle mondiale, on peut prévoir une quasi-disparition de toute possibilité de culture dans des zones déjà très chaudes et sans ressource en eau et, peut-être, une extension des zones cultivées dans les régions nordiques. Les principes généraux de l’agro écologie doivent se généraliser de façon très différenciée selon les situations avertit François Papy.

« Urbanisation des campagnes » ou « ruralisation de la ville » s’interroge Monique Poulot [3] . Le débat reste ouvert sur la délimitation du rural, sur les mécanismes et processus de mobilité qui les alimentent, sur les conséquences liées aux changements d’usages, aux modifications du bâti ou aux convoitises et conflits dans le champ du foncier, des rapports sociaux ou politiques. A cela répond la volonté de conjuguer ensemble ville et campagne, urbanité et ruralité sur un même espace et dans un métissage des manières de vivre. Les études et recherches un peu délaissées dans ce domaine devraient pouvoir apporter des réponses appropriées.

A lire : les derniers articles mis en ligne

François Papy  : Les agricultures du monde face au dérèglement du climat, (2016)
Le dérèglement du climat va accentuer les inégalités déjà importantes entre les diverses agricultures du monde. L’article montre qu’il est possible de concilier adaptation et atténuation en s’inspirant des principes généraux de l’agroécologie qui doivent être mis en œuvre de façon différenciée selon les situations. De nouveaux agro-systèmes sont à concevoir localement pour subvenir le mieux possible aux besoins des populations. In fine, elle nécessite d’établir des échanges commerciaux entre pays, mais aux antipodes des principes de libre échange qui prévalent actuellement.
Cet article ne s’attarde pas sur l‘appréciation de la non durabilité des pratiques agricoles dominantes au Nord (note du secrétariat d’édition).

Vincent Chassagne, Johan Milian  : A l’écoute des démarches de transition dans 9 territoires, (2017)
Face à l’impératif d’un changement de trajectoire pour s’engager dans un développement durable, de nombreux territoires ont initié des démarches de transition. Les « écoutes » auprès de 9 d’entre eux menées par un collectif d’écouteurs de L’UNADEL, Mairie Conseils et 4D, permettent d’avancer quelques enseignements à partager et approfondir.

A relire dans l’EDD :

Liliane Duport, Françoise Gourio Mousel  : Développement durable en Picardie, (2015)
La Picardie est une région peu densément peuplée que caractérise un maillage de petites villes et où les activités agricoles occupent une place prépondérante. Sa population est jeune mais exposée au chômage et à la pauvreté et ses ressources naturelles sont parfois exceptionnelles. De nombreuses voies de circulation, objet d’un trafic routier intense, la traversent. Son industrie régresse tout en demeurant l’une des premières régions industrielles de France. La région dispose d’atouts réels pour des avancées vers un développement durable et portent des projets exemplaires mais peine à les transformer en une stratégie territoriale globale.

Mélanie Durand et Cécile Serrate  : Les TIC au service de la solidarité territoriale, (Auvergne) (2012)
Région de tradition ouvrière et agricole, bénéficiant d’une situation écologique favorable, l’Auvergne dispose de nombreux atouts en matière de développement durable. En particulier, ce territoire est en mesure de proposer une alternative durable au modèle de développement très urbanisé des grandes métropoles. Mais l’Auvergne est également confrontée aux défis du désenclavement et du maintien de la population dans les territoires reculés, afin d’accéder à un rééquilibrage démographique entre territoires urbains et ruraux. Le numérique apparaît ainsi comme un atout majeur faire vivre la solidarité territoriale.

Parmi nos partenaires :

L’UNADEL ( www.unadel.org ) se positionne comme veilleuse et accompagnatrice des pratiques et initiatives des acteurs locaux qui s’inscrivent dans des démarches de transition territoriales, écologiques, démocratiques et numériques. Elle contribue à soutenir une ingénierie formée à l’animation et au développement intégré. Le réseau Unadel regroupe des acteurs et des structures impliquées dans le développement local participatif.

L’encyclopédie du développement durable vous proposera bientôt un site remis à neuf et un nouveau logo. Elle est toujours intéressée à la proposition de nouvelles contributions sous forme d’articles ou de remarques.

Notes

(pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note)

[1Selon Philippe Perrier-Cornet – Repenser les campagnes

[2Classification SEGESA - Observatoire des territoires -

[3Revue POUR n°228 « Appartenance, territoire et ruralité ».

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